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jeudi 12 janvier 2012

Libéral ou fonctionnaire ?

Depuis que l'hiver à commencé, nous enchaînons un week-end de travail toutes les deux semaines et les semaines sont chargées avec des accidents de ski assez nombreux, sur des pistes gelées.
Il y a eu l'ouverture de la station de ski, grâce aux faibles chutes de neige survenues juste avant les vacances de Noël. 
Il y a eu également ces trois jours passés à poursuivre l'apprentissage de l'échographie, trois jours d'échanges d'une grande richesse entre le tourbillon des vacances de noël et la bourrasque du week-end suivant.
Il y a eu la préparation de la V3 dans l'établissement de santé qui m'emploie à temps partiel. 
Et il y a eu cette réunion, organisée à l'initiative du maire de Troufignan qui veut relancer le projet de maison de santé pluri-disciplinaire (ou pluri-professionnelle, puisque le nom officiel du machin semble changer). 
Non, je ne cèderai pas au plaisir facile de faire un billet d'humeur sur ce non évènement. Enfin si, peut-être, mais juste un petit, alors...


C'était un midi, à l'heure du repas, dans un restaurant de Troufignan. 
Il y avait là le directeur de l'offre de soin de l'ARS, un consultant, expert dans l'art de monter des projets de Maison de Santé, le maire de Troufignan, les conseillers municipaux de Troufignant de St Frusquin, les pharmaciens locaux qui ont les miquettes à l'idée de perdre leurs prescripteurs, des kiné, des infirmier(e)s, un conseiller général... 
Et puis il y avait aussi les médecins généralistes de la région. Enfin, ce qu'il en reste. Les survivants. Mal rasés, haves, l'oeil hagard et le cheveu en bataille après une nuit de m... et une matinée de consultation.
Le Directeur Général du Service de l'Offre de Soin de l'Agence Régionale de Santé est donc entré en matière en expliquant que l'ARS était prête, maintenant, à contribuer à la création d'une maison ou d'un pôle de santé pluri-disciplinaire qui rassemblerait les professionnels de santé partageant un même projet de santé pour le territoire, dans une logique de réorganisation de l'offre de soin primaire, et qu'il allait missionner un expert, ici présent, pour auditionner les protagonistes de ce futur projet au service des populations rurales vieillissantes...
Le guignol nous a servi un festival de langue de bois mettant surtout en évidence l'arrogance insupportable de ces bureaucrates et leur totale méconnaissance de la vie et de l'activité des gens dont ils prétendent organiser le travail...
- "Jusque là, vous travailliez seuls (nous sommes tous en groupe, avec des paramédicaux associés)
sans coordination (nous nous sommes bien répartis les compétences, et nous nous concertons toujours avant de décider des vacances...).
Vous êtes peu équipés (tables de radio, ECG, spiromètres, test de diagnostic rapides, défibrilateurs, pompes à mucosité, oxygène, protoxyde d'azote...).
Vous êtes submergé par les personnes âgées (non coco! les vieux quittent très souvent la région lorsque le poids des ans est trop lourd. Le froid, la neige et l'altitude ne leurs valent rien).
Il vous faut accueillir les internes (trop tard, on est déjà maîtres de stage !)
La consultation ne sera plus réévaluée, mais la nouvelle convention et la loi HPST promeuvent de nouveaux mode de rémunération à même de vous aider à assurer vos nouvelles mission (eh banane ! nos patientèles sont touristiques ou de passage pour une bonne partie. La rémunération conventionnelle "à la performance" ne nous concerne donc pratiquement pas. Même l'option démographique ne serait pas intéressante vu le nombre d'actes techniques que nous faisons) "...



























Il n'en fallait pas beaucoup pour que la moutarde me monte au nez. La côte d'alerte a été atteinte en moins de 2 minutes.
Visiblement, je n'ai pas été le seul à me sentir insulté, puisque mes confrères ont commencé à s'exprimer sur un mode plutôt agressif.
L'un d'entre eux a profité de la réunion pour rappeler qu'il y a deux ans et demi à peine, l'ARH n'avait opposé qu'une feint de non-recevoir à nos demandes d'aide à la création d'une MdS, puis il a rendu public son départ imminent. 
Un autre a attribué aux cadences infernales le cancer qui le touche et expliqué qu'il arrêtait la médecine générale pour ne plus faire que de la gynécologie.
Un troisième a expliqué que les actes techniques de médecine de montagne n'avaient pas été revalorisés depuis 20 ans et qu'il ne fallait pas chercher plus loin la désaffection de cette médecine particulière par les jeunes médecins n'ayant pas accès au secteur 2...

En quelques minutes, la salle de restaurant était devenue "règlement de compte à OK Corral".
On aurait dit Astérix et Obélix tombant à bras raccourcis sur une phalange de romains  imprudemment aventurée en territoire hostile... l'hallali, la curée, un lynchage verbal...
Rien à perdre, de toutes manières. Rien à gagner non plus d'ailleurs.
Un dernier baroud d'honneur en forme de "morituri te salutant..."
C'était gratuit. Une sorte de défoulement collectif un peu puéril avec le sentiment que foutu pour foutu, il valait mieux se moquer et en rire. Ça serait toujours ça de pris...

Et puis je suis retourné à mes visites, et c'est comme souvent au volant de mon tacot que j'ai réfléchis aux raisons profondes de ma colère.
Nos technocrates de l'ARS et des ministères ont des à priori sur nos activités de médecins de campagne ou de médecins de montagne (ou de médecins de ville). Il ne veulent/peuvent pas évoluer. C'est irritant.
Ils ont aussi des vélléités de piloter l'évolution de la médecine libérale.
Ça, déjà, ça m'énerve, mais je vais essayer de ne pas en rester à ce sentiment négatif.
Sans doutes ont ils des raisons de souhaiter cette évolution. Peut être ont ils même raison de souhaiter cette évolution.
Que veulent-ils au juste ?
Si j'en crois ce que j'ai entendu ce midi, ils veulent :
- des centres de santé implantés là ou ils l'ont décidé, fonctionnant avec des professionnels de santé rémunérés selon des objectifs de santé publique définis par eux même, obligés à assurer une permanence des soins pilotée également par eux même, assurant des séances d'enseignement thérapeutique dont le programme réponds à des campagnes officielles décidées par eux même ou par l'état.
D'ailleurs, le directeur de l'offre de soin de blablabla... l'a bien dit : "Que vous le vouliez ou non, vous serez de toutes manières de moins en moins libéraux. A vous de vous plier à la nouvelle organisation des soins"
Oui, c'est une phrase que j'ai entendue au cours de cette réunion.
Avouez qu'ils cherchaient la m... quand même. 

Alors oui, nous sommes clairement à la croisée des chemins.
Que voulons nous pour l'avenir ?
Un système de santé de premier recours administré par l'état et ses services déconcentrés, les ARS, géré d'en haut par les politiques, avec des agents plus ou moins fonctionnarisés (les professionnels de santés) rémunérés selon des objectifs définis par l'état (aujourd'hui : diabète, cancer du sein... demain ...?)
Ou un système de santé indépendant du pouvoir, avec des professionnels de santé libres de leurs pratiques, mais rendant des comptes directement à leurs patients ?

Personnellement, j'ai choisi. Mais peut être (c'est d'ailleurs probable) ne représenté-je pas la majorité de la population. C'est pour le savoir que je mets en ligne ce petit sondage :
Etes vous pour une fonctionnarisation des médecins généralistes ou souhaitez vous que persiste une médecine vraiment libérale, indépendante des pouvoirs publics ?
Que vous soyez médecin ou non, donnez votre avis en répondant à ce petit sondage perso, (colonne de droite au dessus des blog-lists) et en commentant ce post.
Peut-être que cette évolution de la médecine est effectivement souhaitée par une majorité de français.
Vos réponses m'intéressent.

27 commentaires:

  1. C'est en effet très intéressant. je ne suis pas pour un fonctionnarisation de la médecine, mais il faut bien reconnaître qu'il va falloir faire quelque chose.Je suis infirmière, j'ai travaillé en libéral, je suis aujourd'hui salariée, mais en contact quotidien avec des libérales que nous sollicitons et formons pour suivre des patients en dialyse péritonéale à domicile. Les choses changent,on parle de plus en plus d'éducation thérapeutique (on en pense ce que l'on veut) mais forcément c'est la notion de prise en charge du patient qui est en train de muter. bien sûr avec ce que vous expliquez, chaque secteur a ses spécificités et il ne faut pas chercher à mettre en oeuvre la même chose à Triffouillou les alpes, qu'à triffouillou les alouettes.Et enfin, si cette mutation doit avoir lieu, et elle va se faire, il est essentielle qu'elle soit impulsée par les patients et les soignants mais en aucun cas par les technocrates , qui ne doivent n'être que des supports

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  2. Excellent!
    SI le reste du corps médical était aussi uni que la brève assemblée ici réunie...
    La médecine est un métier, pas uniquement une profession de foi de bonnes soeurs aux gonades sacrifiées pour le bien public).
    Service AU public, pas SERVICE PUBLIC.
    Les médecins français sont sous-payés, humiliés et s'occupent en représailles de s'entre-humilier copieusement.
    Le véritable ennemi est un système qui a médicalisé la moindre plainte existentielle, sociale, économique dans le but de (1) détourner l'attention des citoyens des politiques - l'inadaptation à un travail ou au marché devient un truc à foutre sous pilules (2) prescrire des trucs qui rapportent un tas de fric à des grosses firmes aux frais de la collectivité qui rembourse quel que soit le motif.
    Pour frapper, à ma droite un système entier qui apprend aux futurs MG dès le berceau qu'ils sont des couillons trop tarés pour être de vrais spécialistes acteurs du vrai soin et qu'ils ont intérêts à prendre la bouillie qu'on leur sert en chantant des Louanges, tout en nourrissant leur narcissisme meurtri de grandes phrases à la Robespierre sur le rôle majeur du médecin de famille qu'il est trop gentil de venir voir le rhume pour moins cher qu'un serrurier. A ma gauche, des syndicats qui ne représentent quelque chose que s'ils signent les saloperies successives en forme de couleuvres qu'il nous faut avaler et un conseil de l'Olympe qui sénatorise des questions cruciales comme le sexe des feuilles de soins tout en baffant les pauvres naïfs qui s'imaginent vivre dans un pays libre et refusent de bosser 24H/24.

    La médecine, c'est nous.
    Votre vie vous appartient. Pas de 2e tour ici bas.
    Aux armes!*

    (*Au figuré, hein - On se calme)

    Navré pour les fautes éventuelles, pas le temps de relire, mon épouse m'attend: j'ai quitté mon domicile à 7H30 ce matin, je quitte le cabinet à 20H30, journée courte, j'en profite...

    Amis rongeurs et cousins marmottes, haut les coeurs!

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    1. Excellent et bien d'accord : un rongeur au fond de son trou, à soigner d'autres rongeurs (au fond de leur trou !)

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  3. Votre histoire me fait penser à ce que me disait il y a peu un ami, paysan de montagne, qui était confronté à des technocrates du même fond de tonneau, qui tentaient de l'évangéliser sur la rationalisation de l'agriculture de montagne, en mettant dans le même sac la plaine du Chablais et les contreforts pentus de la chaîne des Aravis. Pour reprendre votre débat, je suis pour le service public et pour l'indépendance de la médecine.

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  4. il est dommage que la population ne se rende pas compte que l'accés aux soins change , que le mode de soin évolue. En tout cas les soignés n'ont pas bronché quand certains syndicats médicaux dt MGF leur ont demandé leur soutien pour faire évoluer le mode de fonctionnement de notre si beau systeme de soin.Etant un peu déçu de l'absence d'expression de la population , j'ai tendance à me replier vers la tranquillité et donc je vote pour le dispensaire: enfin peinard!
    PS: j'ai cessé de participer aux réunions prefectorales d'oraganisation de la permanence des soins car trop de temps perdu avec ces imbeciles de technocrates!

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  5. Excellent comme d'habitude

    La Boétie écrivait : " Soyez résolu de ne pas subir et vous voilà libre"

    Mais qui veut être libre ?

    Amitiés

    Marc

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  6. Toujours aussi intéressant de venir lire ici... plein de réflexions.
    Je pense aussi qu'il faut une médecine indépendante de l'état, des labos, etc. Une vrai médecine libérale.
    Avec donc un changement dans la rémunération également : pas possible de faire de la bonne médecine avec une rémunération à l'acte uniquement, si c'est aussi mal coté.

    Bref j'ai pas de solution miracle, au début de ma vie de médecin, je suis en réflexion perpétuelle sur l'avenir de mon métier... et je n'ai pas vraiment de réponse.

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    1. Je ne suis pas médecin, je souhaite pouvoir consulter des médecins qui gardent la possibilité de prendre des décisions professionnelles (décisions médicales donc) indépendantes des directives/ "recommandations" de l'Etat et des labos au cas par cas pour les patients.

      Je ne suis pas contre les points techniques des "autorités" de santé, qui peuvent servir de référence et de repères, mais en devenant des objectifs sur lesquels les médecins doivent faire preuve de leur performance statistique, on risque de perdre de vue tout simplement le cas singulier de chaque patient.

      Peut-être qu'une autre forme d'exercice professionnel que celle en libéral, pourrait être mise en place, sans renoncer à l'indépendance et à l'autonomie requise pour prendre de bonnes décisions médicales ?

      A l'exemple de la formule du "portage salarial", admis dans un secteur comme le conseil en entreprise, les prestations informatiques... lequel permet de travailler en indépendance tout en bénéficiant des facilités du régime salarié :

      http://www.apce.com/pid604/portage-salarial.html

      Ce régime du portage pourrait-il être étendu pour les médecins, les kinés ou les infirmières ?

      Pourquoi ne pas y réfléchir, si cela pouvait convenir à certains de ces professionnels ?

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  7. BonJOUR Marc.
    Qui veut être libre ?
    C'est effectivement toute la question.
    C'est difficile d'être libre. Il faut aussi être responsable.
    Amitiés. A bientôt.

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    1. Bonjour
      l'un ne va pas sans l'autre ...
      mais le problème c'est que l'on nous pense et finalement on nous veut irresponsables, il faut donc décider pour nous . Voila comment réfléchit notre administration ...et notre état .
      un bon citoyen est un citoyen aux ordres ...

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  8. J'ai répondu à ton sondage, médecine libérale, parce que je pense que le système fonctionnarisé n'est pas le Pérou et que l'idée d'être administré par les gusses que tu as rencontrés, en jouant le rôle du lampiste qui devra tout assumer au final me met dans le même état que toi.
    Pour autant je ne crois pas que la médecine puisse être vraiment libérale, il y a beaucoup plus de saints, ou de naïfs, qu'on ne pense dans notre profession mais pas que ça. Ta question est trop abrupte...

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  9. Bonsoir,

    nos amis bureaucrates et syndicalistes félons avancent à pas cachés vers un systéme hybride le plus horrible qui soit, pour nous:les soutiers, mais aussi pour les patients: les dindons.

    Le probléme ce n'est pas le choix d'être fonctionnarisé ou bien de rester libéral, c'est l'absence totale de débat de sociéte sur le sujet, car il s'agit bien d'un débat à poser à tous les citoyens, les enjeux sont trés importants à expliquer, mais ils ne le sont pas du tout par les politiques et le monde médical,et là est le vrais probléme.

    D'autre part, tout est fait actuellement pour approfondir le servage des libéraux rendant de plus en plus illusoire tout espoir de maintient de la pratique libéral, une seule preuve devrait être suffisante : les jeunes diplômés ne s'installent plus en libéral (seulement 8% d'entre eux!)

    Je crois que l'idée des bureaucrates c'est de maintenir les avantages du systéme libéral (la responsabilité personnelle, la disponibilité auprés de la patientéle et moindre coûts salariaux comme de locaux) tout en encadrant par ailleurs les professionnels dans un carcan de régle de P4P avec les pointeurs d'objectifs de santé publique avec un mix de protocole de pratique médical basé sur les avis de la HAS, tout cela ressemblera à terme à des contrats de missions de service public et opposable juridiquement.

    Attendons-nous lorsque la pléthore medicale sera bien réinstallée (dans 15 ou 20 ans) à ce que il y ait le conventionnement sélectif, avec des pôles de santé conventionnés privés (sorte de clinique en soins primaires) où officierons des medecins collaborateurs salariés (non conventionnés ou ne le pouvant plus trop facilement) sous la responsabilité d'un chef d'entreprise médicale, le medecin chef sous contrat d'objectifs, conventionné, ayant peut être "acheté" la structure, un peu comme une officine de pharmacie dont les implantations sont réglementées.

    La volonté des ARS (et donc de l'état) de faire à tout va des regroupements en maison de santé vise cet objectif: créer les locaux et les habitudes pour les populations, cela me semble évident.

    Les tutelles ont acté sans aucun débat citoyen la fin de la medecine libérale personnalisé et de proximité.

    Donc pour répondre :

    Etre fonctionnaire ou salrié ? oui pourquoi pas ...mais à 8 h par jours et les heures sup les astreintes de nuit incluses etc etc mais dans dix ans ou 20 ans quel sera le niveau de rémunération à ces postes de sous fifres éjectables (car dans la réalité nous ne serons jamais fonctionnaires) ?

    Etre libéral ? oui aussi mais sans faux semblant de a jusqu'à z donc inclus la juste rémunération de l'effort fournis, de l'engagement humain et matériel et de la responsabilité que cela comporte !

    La réalité sera tout autre, comme décrit plus haut.

    Cordialement

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    1. En effet il faut être aveugle pour ne pas prendre conscience que nos astucieux pouvoirs publics, qu'il ne faut surtout pas sous estimer, s'attachent à mettrent en place (insidieusement ?) un statut (piège?) original combinant les désavantages du salarié soumis au respect d'objectifs quantifiables pour bénéficier de rémunérations forfaitaires et ceux du libéral qui finance l'intégralité de son outil de travail et paie ses charges comme toute PME , les indemnités en question devenant vite indispensable pour cela (et le piège se referme)...Après bientôt 30 d'exercice libéral en milieu rural ,bientôt seul sur mon secteur et n'étant pas particulièrement enthousiaste pour endosser le rôle de "dernier des Mohicans" , j'opterai pour le salariat à la première opportunité et "cultiverai mon jardin" pour mes dernière années d'activité. Un confrère désabusé

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  10. Bonjour,
    je suis médecin généraliste remplaçant, et votre question me parait vraiment judicieuse. Moi je ne suis pas contre le fonctionnariat à priori.
    Les jeunes médecins rechignent à s'installer dans les zones isolées (et on sait pourquoi!) et la pénurie de médecins généralistes s'accentue ! Par exemple me concernant, je changerais de profession si on me forçait à m'installer dans un endroit sans réseau de soin cohérent (charge de travail ++ et pas d'emploi pour le conjoint)
    Concernant l'indépendance de la profession, je suis bien consciente des dangers des laboratoires et de leur lobbying, néanmoins à l'inverse j'ai aussi eu l'occasion de voir des médecins en remplacement pas toujours très responsables (prescription d'antibiotiques à tout va, faire passer la carte vitale des CMU ou ALD sans voir les patients, compter 5 visites pour prescription d'une boite de paracétamol à chaque enfant... et j'en passe).
    D'un autre côté la plupart des médecins travaillent énormément pour une reconnaissance (financière et morale) insuffisante, avec de lourdes charges tant sur le plan des responsabilités qu'administratives...
    Donc je ne sais pas. Pourquoi ne pas créer un secteur de salariat volontaire ? Des maisons médicales avec des médecins préférant être salariés, et les autres gardant le droit de rester en libéral? Ou une rémunération forfaitaire pour la prévention associée à un paiement à l'acte? (Beaucoup de mes amis n'y sont pas hostiles)
    En tout cas, vaste question, complexe (et n'oublions pas : causée par l'insuffisance de médecins formés ces dernières années ! Et si de moins en moins de médecins s'installent, c'est qu'il y a une raison!) J'espère que la profession ne paiera pas trop cher le prix de ces erreurs.....

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    1. Bonjour, jeune MG remplaçant, je suis assez d'accord avec ce qui vient d'être dit.
      Je suis, en ce qui me concerne, favorable à la création d'un statut de praticien ambulatoire, tout court, calqué sur le statut des praticiens hospitaliers, avec grilles de salaires, COMPTE EPARGNE TEMPS très important car il met en évidence le surplus de travail de l'ensemble du corps de métier (même si son traitement médiatique est merdique : "le butin des hospitaliers"), et surtout pas d'honoraires, d'URSSAF, de paiement à la performance et cae tera, enfin tout ce que j'aime pas.
      Voili voilou c'est mon idée. Je sais que aucun vieux n'est pour, mais quand je vois ou pense voir où se dirige la médevine prétenduement libérale, avec rémunération sur objectifs de santé publique (beuuuuh), de prévention (pouaaah), de dépistage (eeeeerk), et perte quasi complète du curatif autre que les antibios sur angines TDR+, ben ... Non, merci, vraiment, sans façons.
      Ceci dit, contrairement à ma collègue, les coins reculés, en particulier la montagne, m'attireraient plutôt plus que les coins surpeuplés, s'il faut parler d'installation : j'ai l'impression qu'on y pratique une médecine plus proche de la "vraie" médecine générale ... Mais c'est peut être une de mes idées romantiques que j'ai dû choper en lisant un bouquin (sans image).
      Deux obstacles donc pour franchir le pas si je me sentais prêt : le fait que ce soit libéral ; et ma conjointe, moyennement attirée pour être femme au foyer d'un mec qui travaille de 7h à 21h.

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  11. Cher ami,

    Le billet est intéressant et je ne peux qu'y souscrire. Nous avons chez nous un projet de Maison de santé pluridisciplinaire mais ce sont les professionnels qui l'ont demandé et non pas un "machin" collé d'en haut.

    En revanche, votre "sondage" est un magnifique exemple de questions orientées. Afin de garantir qu'il aille encore davantage dans votre sens, je vous suggère même de le reformuler ainsi :
    - une médecine collectivisée fonctionnant sur le mode "dispensaires de brousse" ou "kolkhoze" ?
    - une médecine libérale indépendante de l'état et de toute source d'influence, au seul service des patients pour des soins de haute qualité ?

    Vous devriez pouvoir ainsi approcher des 99% de votes qui viendraient renforcer vos convictions préétablies.

    Pour ma part, si je pouvais faire de la médecine de famille sans subir les contraintes et les risques de l'exercice libéral, et sans être obligé de participer à la course à l'acte, ça m'irait très bien.

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    1. Bonjour,
      Merci de la franchise de votre réaction.
      Il est vrai que j'ai vraisemblablement orienté les questions que j'ai posées, tant je suis inquiet de la dérive actuelle.
      Les gens qui viennent sur ce blog ne représentent pas non plus un échantillon représentatif de la population française. Cela constitue un autre biais à cette petite consultation qui n'a pas vocation à servir de sondage, mais seulement à provoquer la réflexion.
      Je vous propose de faire sur votre blog (le mien étant définitivement orienté) un autre "sondage" (pour autant que le mot "sondage" convienne) sur le même sujet, mais favorisant la réponse "médecine salariée" ou médecine d'état. Que proposez-vous comme questions ?
      Il faut quand même appeler un chat, ... un chat. (et non un chien)
      - une médecine pratiquée par des médecins salariés de l'état et répondant à des objectifs de santé publique.
      - une médecine pratiquée par des médecins payés à l'acte (ou à la capitation), non salariés. (?)
      Quant à moi, j'ai eu plusieurs carrières, dont une activité hospitalière (ancienne), une activité de médecin libéral de campagne pendant 9 ans, puis une activité salariée (d'un groupe privé)pendant 6 ans et je sais que le salariat n'est pas une panacée.
      Malheureusement, en salariat , J'ai été confronté avec une immixtion de plus en plus importante et intrusive des démarches "qualité" contre productives dans ma pratique et avec une pression économique qui commençait à aller contre mon éthique.
      J'ai choisi entre le confort (relatif) du salariat et les risques (relatifs) du libéral et suis revenu en libéral. Ma charge de travail a un peu augmenté et mon revenu n'a pas changé.
      Il n'est pas de système parfait.
      Mais si vous me permettez cet emprunt à La Fontaine, entre "le loup et le chien", je préfère encore être un loup.
      De plus, je crois avoir moins de "conflits d'intérêts" de cette manière.
      Cordialement.

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    2. :)

      Je ne suis pas forcément non plus un défenseur acharné de la médecine salariée. Je pense avoir bien conscience des avantages, inconvénients et limites de chaque mode d'exercice. Je pense que, probablement, l'exercice salarié conviendrait mieux à ma pratique à moi.

      Ma pique visait simplement à pointer combien il était facile d'orienter des réponses en choisissant convenablement les questions. Mais je ne peux pas vous jeter la pierre plus que ça : les instituts de sondages officiels sont eux-mêmes maîtres en la matière.

      Par exemple, un questionnement de type
      - une médecine salariée selon le modèle nordique avec des horaires encadrés, en équipe pluridisciplinaire et dans le cadre de recommandations de bonnes pratiques ;
      - une médecine libérale indépendante, libre de toute influence de l'état et autres "dictateurs" de pratiques professionnelles, et conservant le principe exclusif du paiement à l'acte ;
      ... aurait presque le même sens que votre questionnaire mais les réponses seraient probablement assez différentes.

      Au demeurant, une médecine "indépendante de l'Etat" signifie nécessairement déconventionnement. Sinon, c'est un oxymore.

      Je ne vais pas refaire ici le débat que j'ai eu dans le cadre de mon récent billet "Les conseilleurs et les payeurs". Dominique Dupagne y citait également "Le loup et le chien".
      C'est séduisant en théorie mais totalement faux.

      Dans un hypothétique système libéral pur, hors de toute contrainte publique, ne croyez pas que vous bénéficieriez de l'utopique liberté du loup : ce serait simplement le patient qui tiendrait votre laisse.

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    3. La liberté, la vraie, est nécessairement associée à la responsabilité.
      Dans un système libéral pur, la relation que j'entretiens avec une personne qui recherche des soins et décide de me faire confiance, est équilibrée, en ce sens qu'elle est librement consentie des deux cotés. Je dépends de mes patients pour mon revenu et cela m'oblige à l'excellence(si la simple morale ne suffit pas). Ils dépendent de moi pour leur santé, et cela les oblige à me respecter et à me payer correctement. Il s'agit d'une relation équilibrée. Le patient est libre d'aller se faire soigner ailleurs et je suis libre de refuser de le soigner (en dehors de cas d'urgence bien sûr).
      On ne peut donc pas dire que le patient tient la laisse du médecin. c'est juste nier la notion même de liberté.

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  12. La mentalité des médecins changent mais aussi et surtout celle de nos patients évolue avec leur temps: ils veulent tout " maintenant et tout de suite", sans attente, sans contrainte, sans risque, etc... La médecine est devenue (malheureusement?) un service comme un autre et nous médecins, il nous semble que la machine étant lancée, il nous est impossible de la faire changer de direction...Alors avant d'être usé par le système, essayons de développer nos facultés d'adaptation pour trouver un équilibre entre l'exercice de notre art et une vie épanouissante. Pour ma part, j'ai choisi de travailler en libéral comme un fonctionnaire ( pas plus de 8 heures par jour et je vous assure que j'y arrive!!! sans avoir les contraintes d'un patron sur le dos)

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  13. Bonjour à tous
    Le message initial me pousse à rajouter mon expérience... Nous sommes 3 jeunes médecins généralistes, exerçant depuis 6 ans. Nous avons CHOISI l'exercice de la médecine générale, choisi la qualité des soins (consultation moyenne de 20 à 25 minutes et CHOISI l'exercice libéral... Quelle erreur!!! Nous sommes, comme nombre de confrères, excédés et écoeurés par l'attitude de nos dirigeants, de nos syndicats (je pense que nous sommes la seule profession de France et de Navarre dont les pseudos-syndicats acceptent les non-revalorisations, le sabordage du système de retraite, les brimades de la sécu et de l'ARS...quasi sans contre partie). Ne pouvant lutter contre ce système qui essaye (non sans succès d'ailleurs) d'écraser les généralistes (faisant fi du rôle primordial et irremplaçable du médecin généraliste), nous dévissons tous les trois notre plaque et partons exercer à l'étranger... Merci ARS-SECU-SYNDICATS-POLITIQUES...qui eux n'auront jamais de souci pour trouver un médecin...contrairement à nombre de français... Nous n'avons plus le temps d'attendre 10 ou 15 ans une amélioration de notre système de médecine générale libérale, sauf à finir sous anti-dépresseur, harcelés de toute part... Nous quittons avec tristesse le navire qui coule...

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    1. Dommage.
      Mais je comprends ce sentiment.
      Quel pays si ce n'est pas indiscret ?

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    2. Deux partent pour le Canada (accords existants). Un pour la Belgique en vue d'une spécialisation autre. C'est effctivement dommage mais la dégoût et la frustration sont tellement présents que nous baissons les bras (perspectives pas joyeuses pour les prochaines années, n'oublions pas que nous sommes des nantis qui travaillons 80h/semaine pour un tarif horaire très modéré, en en prenant plein la figure de la sécu, des médecins conseils, de l'ARS, des politiques, des journalistes, voire de nos syndicats... Ceci tout en laissant notre vie familiale de côté... Pour le merci on repassera). Franchement nous sommes très décus... Comme nombre de nos amis de promotion d'ailleurs...

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  14. Docteur Isabelle Luck Elancourt Yvelines27 janvier 2012 à 15:29

    Et si on avait l’audace de se déconventionner ?
    Ne plus être déshonorés par des tarifs de consultations de base les plus bas en Europe (23 € brut pour plus de 20 minutes de consultation en médecine générale, tarif qui n’a pas suivi le coût de la vie) pour une profession des plus diplômées aux lourdes responsabilités et aux horaires et cadences de travail parmi les plus importants en France!
    Etre enfin honorés par nos patient s qui nous respecteront comme ils respectent les grands pontes qui prennent si cher (mais c’est qu’ils sont bons !) même s’ils râlent un peu pour le principe car la médecine c’est un droit qui est emboursé en France. Tout comme ils respectent l’ostéopathe (par lequel ils passent d’ailleurs souvent avant de nos consulter en cas d’échec), la diététicienne, le psychologue sans parler des coiffeur, manucure, esthéticienne, forfait téléphoniques, abonnement aux chaines télévisées payantes, tabac, forfaits de ski dont beaucoup de Français font passer le budget avant celui de leur santé !
    Ne plus subir le joug des caisses qui nous soupçonnent et ne nous font pas confiance, qui méprisent la valeur de notre travail surtout quand il est moins technique et davantage clinique et humain, qui nous contrôlent et nous accusent de délit statistique, veulent nous faire rentrer dans des cases comptables et formatées alors que la médecine est un art basé sur des valeurs autant cliniques, psychologiques et humaines (donc pas forcément exactes et reproductibles) que scientifiques et techniques.
    Se libérer des contraintes administratives que nous imposent les caisses qui nous font faire leur travail à leur place et à nos frais !
    Garder notre indépendance et notre liberté pour bien soigner nos patients et ne plus avoir de conflit d’intérêt avec les caisses comme la nouvelle rémunération à la performance sur les objectifs comptables qu’elles nous proposent !
    On pourra dire merci à ces politiques qui en 25 ans nous ont raréfiés et paupérisés, et qui cherchent à nous diviser et nous assujettir de plus en plus : ils auront peut-être en définitive permis un prochain déconventionnement des médecins et leur libération. Cela va leur faire tout drôle de plus avoir à nous encadrer et nous faire faire en partie leur travail, d’être obligés de nous faire confiance. Cela va leur faire bizarre de voir qu’il n’est plus besoin de légiférer pour faire s’installer de jeunes médecins. Cela va peut-être même leur faire honte de constater que le trou de la Sécu n’est pas pis depuis que les médecins secteur3 sont plus nombreux et peuvent enfin travailler libéralement et qu’ils font même certaines économies, au moins sur tous ces beaux papiers glacés que leurs statisticiens produisaient sans idée du retour sur investissement produit. Cela va surtout aussi leur faire peur car ils craignent notre pouvoir et voulaient nous l’aliéner comme ils ont aliéné celui des juges d’instruction. Mais ils oublient que notre pouvoir s’il en est ne sert qu’à servir l’intérêt de nos patient et non le nôtre, contrairement à eux qui ne connaissent pas Hippocrate et se servent souvent très naturellement du pouvoir politique à des fins lucratives ou à des acquisitions de passe-droit…
    Le déconventionnement de masse est peut-être en gestation mais il faudra que l’accouchement ait lieu avant l’extermination programmée des médecins dits libéraux …

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    1. Bonsoir,

      j'ai aussi le sentiment qu'un mouvement de déconventionnement des medecins pourrait donner une forme de renouveau au metier mais il est bien tard quand même.

      Et n'est ce pas là justement ce que nos tutelles souhaitent à terme : que nous cessions le jeux du conventionnement par nous même car (1) il leur est délicat devant les populations d'être les responsables de la fin des tarifs conventionnés (2) le passage d'une offre de soins primaire libérale à celle d'une offre de soins institutionnelle (en centre de santé conventionné) sera trés délicate à gerer, elle est d'ailleurs déjà en cours avec la multiplication des centre de santé dans les zones rurales, pour l'instant avec des libéraux surtout (il y aura à terme forcément plus de volontaires quand le conventionnement sera selectif et le retour de la pléthore medicale, dans 10 ans les cebtres de santé seront des lieux de stage pour les internes de troisiéme cycle, la medecine personnelle et de proximité sera vite oubliée et à nous le modéle anglo-saxon et scandinave.

      Le metier s'annonce bien sombre à ce niveau, le servage va inéluctablement s'approfondir à cause des syndicats que nous avons en ce moment,: des pleutres.

      Cordialement

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    2. Je vois avec plaisir que l'idée du déconventionnement collectif progresse enfin dans la tête de mes collègues.
      A part la FMF qui l'évoque timidement, les syndicats l'excluent totalement. On comprends bien pourquoi. C'est un suicide pour leur institution qui dépends de la convention.
      Je pense effectivement que le déconventionnement massif est un préalable à l'assainissement de nos relations avec le pays.
      Cela dit, nous gagnerions en dignité et en liberté.
      Nous perdrions probablement en revenu brut, mais tout n'est pas une question d'argent. Cela se discute. L'argent n'est certes pas le plus important, mais il faut pouvoir vivre.

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    3. Bonsoir,

      le tout début de la possibilité d'un déconventionnement massif serait que le tarif d'autorité n'existe plus : il faudrait faire une association pour dénoncer l'anticonstitutionnalité de cette loi ! (pas moins !) A cette seule condition qui va protéger nos patients des inconséquences réglementaires, je suis prêt dés maintenant à me déconventionner, je paierais plus d'AF, plus de cotisation sécu, l'ASV au panier et sans doute pleins d'autres changements ... et certainement aussi beaucoup moins d'impôt... l'un dans l'autre au moins je perdrais pas mon honneur et c'est là l'essentiel, car franchement qui d'entre nous ne trouve pas que la convention est devenue au fil du temps une escroquerie.

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