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lundi 13 août 2012

Paiement à l'acte ? Salariat ? Capitation ?

Alors que rien se semble pouvoir enrayer la chute de la médecine générale, la blogosphère médicale bruisse de mille bruits.
Gelule raconte le quotidien d'un médecin de campagne et s'indigne qu'on puisse à ce point dénigrer la médecine générale.
Borée parle de la sortie de son livre, que je n'ai pas encore lu, et s'exprime avec intelligence sur la certification en médecine générale.

Le conseil national de l'ordre des médecins jette un pavé dans la mare, en donnant blanc-seing au nouveau gouvernement pour forcer les jeunes médecins à aller exercer dans les déserts médicaux, tandis qu'il déclare acceptable pour le secteur 2, des honoraires allant jusqu'à 4 fois les tarifs conventionnels.
Sans doute faut-il comprendre là que les membres du conseil national sont urbains, âgés et en secteur 2 (c'est le cas du Dr Legman, président du conseil national, qui applique des tarifs allant jusqu'à 3 fois le tarif conventionnel, si l'on en croit simplement l'assurance maladie).

Dominique Dupagne aborde la possible fonctionnarisation de la médecine de premier recours, comme je l'avais d'ailleurs fait il y a quelques mois.
C'est d'ailleurs un sujet sur le point de devenir un marronnier.

Nos internes sont étonnés et intéressés par notre pratique de médecins "couteaux suisses", mais quant à venir travailler avec nous, ils plébiscitent tous le salariat, et particulièrement  en médecine d'urgence à l’hôpital. C'est d'ailleurs bien compréhensible. Si j'ai bien compris, une seule garde hebdomadaire de 24 h leur permet de gagner sur 50 jours/1200 h (comptons 100 jours si l'on tient compte des récupérations), et en débutant, environ 65% de mon revenu de médecin rural travaillant 260 jours par an (environ 2500 h/an sans compter les astreintes nocturnes) et ayant 20 ans d'ancienneté.
Un rendement horaire largement supérieur...     Comment attirer des jeunes avec ça...
Avec des MSP ? 
Avec des subventions publiques ?
Au delà du revenu horaire qui est plutôt plus intéressant en salarié, il y a aussi bien sûr les horaires de travail qui sont perçus comme trop contraignants en médecine libérale rurale. Forcément si on est de moins en moins nombreux...
Mais je perçois un désamour profond pour le paiement à l'acte. Un dédain pour ce type de rémunération qui me semble largement irrationnel ou sciemment implanté dans l'inconscient collectif, et qui parait s'apparenter aux commentaires peu réfléchis de certains commentateurs de ce blog ou à certaines considérations actuellement en vogue dans le monde politique, tant à droite qu'à gauche : "le libéral, c'est le Mal !" " les médecins libéraux sont des cupides"...
Tous, même les jeunes médecins, semblent s'accorder sur le fait que le paiement à l'acte serait dégradant pour le médecin et pourvoyeur de médecine à 2 ou 3 vitesses, tandis que le salaire serait le "nec plus ultra" des modes de rémunération possibles. Le plus vertueux. Le plus égalitaire...
C'est, à mon avis, un raccourci abusif qui tient davantage de l'expression d'une certaine pensée unique et d'un formatage idéologique que d'une réflexion étayée.
Si le paiement à l'acte n'est certainement pas la panacée, il présente un certain nombre d'avantages, pour le médecin et pour le patient, que je vais développer ici. 

1989. J'ai 24 ans. 7ème année de médecine (sur 8). Je fais mes premiers remplacements, et comme je travaille dans un hôpital périphérique, ce sera en rural. Des débuts stressants, qui ressemblent à ce que Gélule le décrit dans son blog, Sauf que je ne sais rien ! pas de stage en MG, pas d'internet, bien sûr. Je consulte avec le "guide des premières ordonnances" sur les genoux. Je mens sur mon age en disant que j'ai 28 ans. Je suis lent, hésitant. Je compense avec la relation humaine. Fréquemment, le soir, ou le matin tôt, je passe au domicile des patients qui m'ont posé problème, pour me rassurer, pour vérifier que cela ne tourne pas en péritonite ou en méningite... gratuitement bien sûr.
Sur le tas, finalement, c'est là qu'on apprends le plus. 
J'aurais bien accepté un salaire pour faire ce métier, mais je n'ai pas eu le choix. C'était libéral ou rien. Tant pis. Je trouve difficile de demander les 90 FF de la consultation aux patients et je suis toujours surpris de leurs réactions. Ils préfèrent payer. Je pense même que pour beaucoup c'est un symbole important dans leur relation au médecin. une sorte de contrepoids.
- "faites vous payer, vous serez respecté !" me répète-t-on plusieurs fois par jour.

1994. La consultation vient de passer à 115 FF. Je suis installé depuis 1 an et je me suis associé avec un généraliste de 20 ans mon aîné. Nous avons créé notre petit centre médical rural de 2 médecins, adossé à la pharmacie du village.
Bien sûr, je suis en secteur 1. Je n'ai pas eu le choix, mais l'aurais-je eu que j'aurais choisi le secteur 1, pour raisons idéologiques. Le secteur 2, c'est mal ! cela empêche les gens de consulter quand ils en ont besoin. Du moins, c'est ce que je crois
Nous sommes en SCM et en partage d'honoraires. Une fois les frais payés, nous partageons les bénéfices en deux parts égales. C'est une manière d'éviter le "vol de clientèle".
Je suis resté lent. On ne se refait pas. Je traque la pathologie sévère, fais mes enquêtes alimentaires, passe des heures à écouter, à essayer de dénouer les situations compliquées, fais beaucoup de renouvellement à 3 ou 6 mois...
Mon associé est plus expéditif. A 50 ans, il a l'oeil rivé sur la ligne bleue du MICA qu'il espère rejoindre bientôt (il ne sait pas encore que celui ci reculera à chaque fois qu'il avancera...). Il travaille vite. Ses patients y sont habitués. Ceux qui veulent plus d'écoute prennent l'habitude de venir me voir. Certains de mes patients changent pour lui...
Mes journées sont bien plus longues que les siennes, mais je ne fais que 5 à 10 % de chiffre d'affaire de plus que lui. Comme nous travaillons en partage d'honoraires, je perds un peu d'argent. C'est le jeu. Je gagne quand même un certain confort de vie.
J'observe autour de moi des collègues qui font 70 ou 80 actes par jour. Certains sont de bons cliniciens qui travaillent jusqu'à 15 ou 16 heures par jour et ont une énorme patientèle . Quelques uns, peu nombreux, font objectivement un peu n'importe quoi, font revenir 3 fois une angine, se font une patientèle en distribuant les arrêts de travail, font de la "repasse"...
Je trouve injuste que leur revenu soit 2 ou 3 fois supérieur au mien.
Ce paiement à l'acte, décidément, n'est pas adapté à une médecine de qualité. C'est plutôt une prime à la "non-qualité".

2002.  Je suis épuisé. La consultation est toujours à 115 FF (17,53 €) depuis 9 ans maintenant.
Chaque année a vu surgir de nouveaux postes de dépense (informatisation, télé transmission, évacuation des déchets médicaux, URML, cotisation à la formation médicale continue obligatoire (la cotisation, pas la formation !)...
Mon revenu s'effrite chaque année alors que mon chiffre d'affaire est 50 % plus élevé qu'en 1994.
Le plan Juppé m'a cassé. Les punitions collectives en cas de dépassement de l'ONDAM sont un déni de droit et une insulte à la profession. Ces mesures totalement injustes ont été parfaitement bien acceptées par la population. C'est ce qui me fait le plus de mal.
Koushner, ministre de la santé, en a rajouté une louche en critiquant les médecins généralistes qui ne s'impliquent pas dans la permanence des soins. Me dire ça à moi qui enchaîne régulièrement des gardes de 60 heures d'affilée, sans régulation, en ne dormant pas plus de 2 h par nuit !
Je comprends que le médecin est vu comme un nanti et qu'en France, on déteste les nantis. 
Si les relations humaines de gré à gré sont chaleureuses, l'inconscient collectif des français souhaite cette paupérisation des "riches" médecins. 
J'ai compris depuis quelques années que la médecine libérale, telle qu'elle existe encore est condamnée par les élus et les hauts fonctionnaires.
Qu'à cela ne tienne, puisqu'ils détruisent la médecine libérale et le paiement à l'acte, ils vont être forcés d'ouvrir des centres de santé avec des médecins salariés, ou payés à la capitation. 
Cela fait plusieurs années que je suis prêt à changer de mode d'exercice et de rémunération, mais je ne vois rien venir.
Bizarre non ? 
Non, pas si bizarre si l'on considère que les libéraux, quoi qu'on en dise abattent un travail de fou, pour une rémunération somme toute assez modérée. Les remplacer par des salariés coûterait beaucoup plus cher, d'autant plus que nous sommes passés aux 35 h. 
Oui mais si l'on considère les abus de prescription et les consultations évitables, secondaires aux dérives de l'exercice libéral, peut-être que les économies potentielles compenseraient le surcoût des médecins salariés. 
En regardant autour de moi, je me rends compte que les comportements sciemment malhonnêtes, des médecins et des patients sont relativement marginaux. Conséquemment, les économies possibles sont vraisemblablement anecdotiques.
Je poste une annonce sur "annonces-médicales.com". Les propositions affluent. Je ne choisirai pas la plus rémunératrice, mais celle qui me parait le plus en accord avec ce que j'ai envie de faire de ma vie. Un poste salarié en clinique de réhabilitation. 
Je comprends aussi que ma vraie richesse, ce sont mes compétences. Et on aura toujours besoin de médecins compétents.

2004 : Je suis salarié depuis 2 ans. Au début, mes revenus étaient assez faibles et puis ils ont évolué. A l'heure actuelle c'est correct, sans plus, mais l'argent n'est pas le plus important. 
J'ai épousé le projet médical de la clinique et le travail en équipe. Au début, cela a surpris la direction et les membres du personnel. Un "libéral" qui s'adapte au salariat et au travail en équipe ! WTF !
Mes confrères changent souvent.  Beaucoup ont des difficultés à s'adapter à ce mode de travail où le médecin n'est qu'un membre de l'équipe soignante. Du coup, il y a un turn-over important, je suis rapidement devenu le plus ancien et un peu le référent médical. J'ai même le titre de "chef de service" (un des 4 services - nous sommes tous "chefs de service"). Bien sûr, c'est essentiellement "honorifique". Je n'ai aucune latitude dans mon travail, et en tant que généraliste, je n'occuperai jamais une place de direction. Je m'en moque. 
Au début, le travail salarié m'est apparu comme une vraie sinécure, mais je n'ai pas vraiment changé de façon de travailler, finissant tard, faisant beaucoup d'astreintes. Comme je suis globalement moins caractériel (si si !) que certains de mes confrères c'est moi qu'on vient voir en cas de problème, en cas de travail supplémentaire. 
Je suis le plus (un des plus) impliqué, mais le moins payé... 
Parfois cela me fait un peu "tarter", mais c'est ainsi... Pas bien grave tant que le travail reste épanouissant. 

fin 2007 : 5 ans et demi que je suis salarié. Ce qui est vraiment pénible, ce sont toutes ces réunions d’accréditation et les changements qui en découlent. 
Je suis intuitivement violemment opposé à la plupart des changements liés à l'accréditation...  ... mais je n'ai pas le choix. Je suis OBLIGE d'appliquer la politique de la direction. En tant que manager, je suis même obligé de motiver les autres. Le boss m'a bien fait comprendre que mon rôle de chef de service était d'entraîner les membres de l'équipe. 
Cela me met dans une situation intenable, écartelé entre mes convictions intimes et ma loyauté vis à vis du groupe qui m'a donné ces opportunités de carrières et qui me paye. 
Qui plus est, la politique du groupe évolue au gré des tractations avec l'ARH. Le beau projet médical du début est de plus en plus régulièrement foulé au pied des contingences matérielles. Il faut remplir ! Je peux comprendre cela, et en tant que "chef de service" j'assume, en tampon entre l'équipe et la direction. Je me retrouve à devoir justifier des choses peu justifiables devant les patients ou devant les membres de l'équipe. 
Pourtant, mon opinion est claire. Notre éthique a tendance à foutre le camps. 
La direction veut maintenant nous imposer des contraintes supplémentaires pour les dates de nos vacances. Cela devient injouable pour moi, entre les astreintes, les congés scolaires de nos enfants, les impératifs de mon épouse, ceux de mon ex, ceux de l'ex de mon épouse, ceux de l'époux de mon ex et de l'épouse de l'ex de mon épouse... si en plus, la direction impose des dates, ça ne va pas le faire...
Je suis de moins en moins sûr que le salariat soit un vrai confort !  
Au bout du compte, c'est mon confort moral qui a le dessus sur mon confort matériel, et je démissionne, à la surprise générale. Je suis prêt à tout recommencer à zéro pour la troisième fois.

Aujourd'hui je suis à nouveau libéral. Je ne considère pas pour autant que le paiement à l'acte soit parfait. 
Le salariat est un mode de rémunération qui parait attractif comparé à ce que les pouvoirs publics et les syndicats de médecins ont fait du libéral. L'hypothèse d'un passage généralisé au salariat n'est plus considérée comme farfelue.
Une récente réunion avec des membres du CDOM de mon département et l'ARS à propos du tableau de garde que nous avons de plus de mal à remplir, a été assez éclairante à ce sujet.
Alors que la discussion avait dérivé sur les différents projets de MSP et les inextricables complications administratives venant entraver le versement des indispensables subventions publiques nécessaires aux projets, j'ai déploré le bon vieux temps où l'acte était assez honoré pour que les médecins assument l'ensemble du coût de la construction de leurs centres médicaux sans que les administrations s'en mêlent. 
Le président du CDOM m'a aussitôt coupé : 
"Cette médecine que tu as connu, elle est morte et elle ne reviendra plus ! le paiement à l'acte, c'est fini ! Maintenant, il faut faire avec les administrations ! Maintenant ce sont eux qui décident ! "
Silence approbateur des membres de l'ARS.
Au moins, c'est clair.
Les autorités rêvent d'un système où les médecins seraient salariés, où ils seraient contraint par leur hiérarchie (oui, car un salarié a toujours un patron) a appliquer les procédures élaborées par l'HAS par exemple, ou par la sécurité sociale, ou par le ministère, ou par le CISS, pourquoi pas.
 Plus étonnant, nombre de jeunes médecins souhaitent cela.

Que reproche-t-on exactement au libéral et au paiement à l'acte ?

- Le paiement à l'acte met le médecin dans une position de sujétion vis à vis des patients, qui est parfois difficile à gérer pour le médecin.
Sans doute, mais à l'heure où l'on dit vouloir remettre le patient au centre du système de soin, n'est-il pas naturel que ce fameux patient soit détenteur d'une part de pouvoir dans la relation thérapeutique ?
N'est il pas naturel dans une relation, fut-elle thérapeutique, que chacun des protagonistes ait une forme de "pouvoir" sur l'autre. La connaissance médicale constitue une forme de pouvoir du médecin sur le patient, une asymétrie dans la relation. Au nom de quelle "pureté" devrait on refuser au patient la parcelle de pouvoir que représente son paiement et la relative sujétion du médecin qui en découle.
Du coté du médecin, cette dépendance relative vis à vis du patient, n'est elle pas une incitation à une certaine humilité et surtout une certaine qualité du "service" ?
Enfin, ne vaut-il pas mieux dépendre du patient directement que d'une administration ou d'un pouvoir hiérarchique.
En tant que "libéraux" nous avons encore (pour combien de temps) une certaine liberté de prescription. Comment vivrons nous les objectifs de santé publique lorsque des administrateurs viendront critiquer nos taux de réalisation de mammographie de dépistage ou nos taux de prescription d'antibiotique, ou nous forcerons à augmenter le taux de vaccination contre l'hépatite B...
Les objectifs ne seront sans doute plus incitatifs. Il y a fort à parier que dans un système salarial, ses critères deviendront contractuels pour le médecin...
J'ai connu des situations approchantes et je préfère encore le paiement à l'acte, tout imparfait qu'il soit.

- Le paiement à l'acte est inflationniste en ce sens qu'il pousse le médecin à augmenter le nombre des actes pour augmenter son revenu, ou pour qu'il se maintienne.
C'est sans doute un peu vrai, d'autant plus vrai que le médecin n'est pas libre de ses tarifs (en secteur 1) et que la valeur des actes ne suit pas l'inflation depuis de longues années. 
La pseudo-gratuité des actes médicaux constitue un autre facteur de multiplication des consultations inutiles qu'il n'est pas politiquement correct d'évoquer publiquement, mais qui existe bel et bien. Le patient n'est statistiquement pas plus ni moins vertueux que son médecin...
Ceci dit, la désaffection profonde des médecins pour l'exercice libéral contrecarre largement cet effet pervers. En effet, pourquoi faire revenir les patients quand on pas assez de temps pour recevoir tous les patients qui se présentent spontanément. 
Ce comportement non-vertueux de certains médecins, déjà très minoritaire il y a 20 ans, me parait avoir quasiment disparu aujourd'hui. Une revalorisation substantielle des actes, ou,mieux, la réintroduction d'une certaine dose de liberté tarifaire le ferait disparaître complètement.
Que se passerait-il dans un système salarial ? 
Le médecin serait payé pour un service, avec des heures de présence à accomplir. Passés ces horaires, il serait sûrement difficile d'obtenir un rendez vous ou une consultation en urgence. 
Certains travailleraient largement au delà de leurs horaires, d'autres en feraient le minimum. Au bout du compte, l'efficacité du système chuterait et je crains la création rapide de files d'attente longues en médecine générale, ou un engorgement encore plus important des services d'urgence.

-   Le paiement à l'acte ne permettrait pas une répartition satisfaisante des médecins sur le territoire français, alors qu'un paiement salarial permettrait aux autorités de bien répartir les praticiens en fonction des besoins. 
Allons bon ! pendant des dizaines d'années les médecins se sont spontanément installé là où il y avait des besoins, mais maint'nant ça marche pu ma bonne dame ! 
Et pourquoi que ça marche pu siouplait ? 
Eh bien je vous le donne Emile, ça ne marche plus parce que ce n'est tout simplement plus rentable de s'installer à la campagne ! Là ! tout simplement ! 
Et ça n'est plus rentable parce que les honoraires sont fixés autoritairement sans tenir compte du coût réel d'une médecine générale moderne, en particulier en zone isolée.
Revalorisons l'acte, ou rendons une part de liberté au médecin et la pseudo pénurie disparaîtra purement et simplement.  
Enfin, quand je vois les choix faits par mon ARS pour l'implantation d'une MSP dans nos hauts cantons, j'hallucine ! C'est Ubu roi et messieurs les ronds de cuir associés ! 
Des choix abérants pris à 250 km d'ici dans un bureau, par des gens ne connaissant rien à la réalité locale,  en raison d''un zonage débile, mais impossible à remettre en cause avant de nombreuses années. 
L'assurance d'un plantage en règle. 
Alors je ne peux, en aucun cas, croire que les mêmes personnes seront bien inspirées lorsqu'il s'agira de décider où implanter les médecins. 

- Le paiement à l'acte est inadapté au suivi des maladies chroniques. 
- Tient donc. Pourquoi ? 
- PARCE QUE !!!
- Mais encore ? 
- Les maladies chroniques nécessitent un suivi constant, des renouvellements d'ordonnance, de la prévention, de l'enseignement thérapeutique... 
- Et alors ? ai-je envie de dire. 
- Et alors, le paiement à l'acte n'est pas adapté !
Encore un mantra, que l'on répète en boucle. Pourtant cette explication me parait un peu courte. Il n'y a pas de raison majeure pour qu'un médecin (ou un autre soignant) ne puisse pas se faire rémunérer par un patient qu'il reçoit pour l'aider à gérer une pathologie chronique. 
De plus, comme le rappelle Dominique Dupagne dans la revanche du rameur, le médecin doit ici faire preuve de la plus grande humilité. De nos jours, les patients connaissent de plus en plus souvent, mieux leur pathologie que leurs médecins. Web 2.0 oblige. 

Cette liste de critiques faites au principe du paiement à l'acte pourrait être poursuivie à l'envie.
Il ne me parait pas utile de continuer à mettre en évidence les idées reçues et les à-priori qui minent le discours sur le paiement des médecins.
J'avais déjà pointé du doigt la volonté politique de mettre au pas le corps médical avec les maisons de santé et avec le P4P.
Cette critique permanente du paiement à l'acte me parait être un nouvel avatar de la volonté forcené de pouvoir de l'oligarchie dominante évoquée par Dominique Dupagne toujours dans la revanche du rameur.

Par conséquent, et pour paraphraser Churchill, il me semble que le paiement à l'acte est certainement le plus mauvais système de rémunération d'un médecin...  ... à l'exception de tous les autres.

53 commentaires:

  1. Belle réflexion.
    Merci de me la faire partager.
    Tu écrit :
    Le président du CDOM m'a aussitôt coupé :
    "Cette médecine que tu as connu, elle est morte et elle ne reviendra plus ! le paiement à l'acte, c'est fini ! Maintenant, il faut faire avec les administrations ! Maintenant ce sont eux qui décident ! "
    Silence approbateur des membres de l'ARS.

    Pour moi , tout est dit.

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    1. Bonjour Marc.
      Oui, et les médecins libéraux présents n'ont pas moufté non plus. La plupart font profil bas pour obtenir des "aides", en pensant en retirer plus d'avantages que d'inconvénient.
      On nous refait le coup de la convention, en quelques sorte.
      La génération de nos aînés a cru que la convention apporterait du confort dans leur vie. Cela a été vrai quelques années au prix d'une abdication d'une part de leur liberté et de leur probité. A terme cela détruit le corps médical.
      La génération actuelle est prête à un deuxième renoncement pour les mêmes raisons. Les mêmes conséquence suivront. Mais cette fois ça ira beaucoup plus vite.
      Bonne chance pour tes projets.

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    2. Les Médecins libéraux ont perdu leur liberté sans gagner en sécurité , c'est là tout le problème des trente dernières années.
      Nous avons autant de contraintes qu'un salarié(sauf le lien de subordination )et n'en avons aucun avantage (social en particulier ).
      Je vis actuellement l'illustration de tout ton post à Belle Ile en Mer où nous inaugurons le "Médecin volant " ,Médecin libéral qui vient du continent assurer le service public à 1000 euro les 24 heures .
      Croyez moi si vous voulez , la charge de travail est si importante que ça ne se bouscule pas ...
      C'est donc pas cher payé.
      24 heures de "triathlon médical " selon les organisateurs , assuré par les Libéraux , l' ARS étant incapable de faire embaucher des salariés par l'hôpital local ,malgré un audit d'experts (parabole du rameur ) , les dits salariés étant encore plus chers.
      Pas de plan "B" donc .
      Le seul point positif est qu'après deux ans d'audit , ils se sont dits qu'il serait très difficile à deux généralistes d'assurer la PDS et l'AMU pour une population estivale de 35000 à 40000 habitants.

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  2. Ben tout est dit... Sauf que je suis jeune médecin et que je ne suis pas particulièrement à fond pour le salariat. Le salariat ne me semble pas LA solution ultime aux problèmes. Chaque système a ses avantages et inconvénients. Et tu les listes très bien. Le paiement à l'acte est inflationniste, je le constate chaque jour avec mon associé, qui a des revenus qui font 3 fois les miens, certes il travaille 5 jours et moi 4, mais mes journées sont plus longues que les siennes.
    Il y a encore tant de choses à dire sur ce sujet. Oui, il faut revaloriser à la campagne, mais ça personne n'est prêt à le dire tout haut!

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    1. Bonjour.
      Le paiement est inflationniste, surtout si la consultation est partout au même prix et si elle est (faussement) gratuite. En discutant avec nombre de patient, on se rend compte que les gens font dans l'ensemble bien la différence entre une consultation médicale sérieuse et une consultation expédiée. Ils tolèrent son existence car elles sont toutes les deux gratuites (à leurs yeux). Naturellement ils se foutent de la manière dont le médecin concerné va être récompensé car cela ne leur coûte rien.
      Je connais des patients qui vont habituellement chez des confrères pour les pathologies faciles et courantes mais qui viennent chez moi quand ça leur parait plus sérieux. Ils me réserves les consultations longues et gardent pour leur médecin les Cs faciles... en toute innocence :-/
      Certains souhaitent être servis rapidement, comme au supermarché et prennent donc un médecin rapide pour la bobologie quotidienne.
      Imagine que tu ne payes pas directement le restaurant mais que l'URSSAF te prélève autoritairement une "cotisation alimentation" et te laisse aller dans n'importe quel restaurant de ton choix, les restau étant forcés de vendre chaque repas au même prix.
      Il y aurait la queue à la tour d'argent, mais, pressée ou affamée, tu irais quand même chez Mc Do.
      Bon, dans un deuxième temps, la tour d'argent disparaîtrait. C'est ce qui est en train d'arriver à la médecine.
      Je lis régulièrement ton blog, même si je n'interviens pas souvent.
      Je suis très mal placé pour conseiller quiconque, mais je te souhaite d'arriver à prendre du recul... ce que j'ai toujours du mal à faire ;-)
      Bon courage. Tu n'es pas seule.
      Amicalement.

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    2. C'est vrai que j'ai du mal avec le recul, mais j'y travaille.
      Mon associé étant dans la case inflationniste, pas évident de bosser différemment. D'autant que comme toi, les patients le voient lui pour la merde qui va vite et donc gagne plus, et vienne me voir moi et AssociéSympa pour les trucs plus complexes et plus longs, donc moins "rentables" et ça me gonfle!
      L'avenir de la médecine me laisse songeuse, comme toi.
      Des biz

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  3. Bon, on doit avoir des gènes en commun ! Je suis impressionné par la convergence de nos analyses de la situation, analyses pourtant assez peu partagées.

    Oui, le salariat est un piège, une dépendance, un miroir aux alouettes. Ton aller-retour libéral-salarié en constitue une démonstration. Si l'on ne tient pas compte des phénomènes de lutte de pouvoir, on ne peut pas comprendre pourquoi les ARS font n'importe quoi, et pourquoi le salariat est la fin de l'autonomie du médecin et du patient, sans avantage en terme de santé publique ni de financement.

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    1. Bonjour.
      J'ai découvert Atoute il y a seulement 2 ou 3 ans, et ce jour là, je me suis dit que je n'était pas tout seul. MERCI à toi d'avoir pris la parole longtemps avant moi.
      Et merci pour la revanche du rameur que je conseille chaque jour autour de moi.
      C'est il y a 10 ans, au cours des démarches qualités entreprises dans la clinique où je travaillais, que j'ai compris qu'il s'agissait ni plus ni moins que d'une lutte de pouvoir. Avant je pensais que les technocrates étaient juste incompétents...
      Dur dur, de prêcher dans le désert, hein ?
      Au plaisir de te rencontrer un jour.

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  4. Intéressant.
    Le salariat peut convenir à certains médecins et pas à d'autres. A certains moments de la vie et pas à d'autres. Hiérarchiquement subordonné et pas merveilleusement payé en salariat, ou des honoraires pitoyables en libéral.
    Le constat est fait.
    Je vois mal quelles sont les possibilités de sortir de ce mauvais choix. Je ne vois pas non plus d'interlocuteurs institutionnels ou politiques qui ne montrent pas de préjugés défavorables à notre égard.
    Vos avis ?

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    1. Bonjour, la sortie ne résultera pas d'un choix, mais de contraintes extérieures, comme souvent. Nous vivons la fin d'une époque http://www.atoute.org/n/Deserts-medicaux-Plus-pour.html .

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  5. Je souscris pleinement à votre authentique synthèse.
    Il est regrettable que les décideurs n'écoutent pas les analyses provenant du terrain et persistent à prendre sans concertations des décisions non adaptées à notre exercice quotidien.
    Espérons que votre argumentaire sera entendu par nos technocrates.

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  6. Merci pour ce post.
    Je suis payé à l'acte depuis 32 ans et je connais les dérives du système, les miennes comme celles des autres.
    Le salariat est aussi un miroir aux alouettes. Les médecins hospitaliers s'en rendent compte, les médecins de PMI aussi, les médecins du travail itou.
    J'exerce la médecine dans des conditions particulières : ZEP, grosses clientèles, groupe de deux médecins, secrétariat à plein temps parfait, proximité des services d'urgence, plus de gardes. Entente excellente avec mon premier puis ma deuxième associée. Je prends dix semaines de vacances par an (avec remplaçant(e))et cela fait, remplaçants compris, 7000 actes environ.
    Si j'étais salarié je travaillerais moins, je gagnerais moins (pas en salaire horaire) et je devrais me farcir les administratifs non médecins et médecins.
    Je ne crois pas agir contre ma conscience en ce moment.
    Je n'ai pas refusé le capi pour payer mon informatique, pas pour les indicateurs.
    Comment les médecins salariés auraient-ils "résisté" à l'épidémie de grippe ?
    Le système anglais n'est plus à la mode. On me dit que ce sont les Suédois qui ont le vent en poupe.
    Je suis plutôt contre la capitation familiale pour des raisons de secret médical et de familles recomposées...
    Mais je reviens travailler aujourd'hui car mon associée est souffrante et ma remplaçante itou.
    C'est la souplesse du libéral.

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  7. Merci pour ce post très intéressant, votre cheminement est éclairant et je suis d'accord avec la plupart des analyses.

    Un seul point me "chagrine" un peu: je trouve que les arguments pour la liberté tarifaire sont faibles, et je ne suis pas convaincu qu'elle réintroduise de la vertu dans le système. Dans un contexte de pénurie de médecins à venir (du moins à certains endroits), elle encourage mécaniquement un système à plusieurs vitesses, en favorisant les patients qui ont les moyens. On transfère le coût de la santé à l'individu.

    Par ailleurs cette liberté va à l'encontre de la revalorisation du secteur 1, en opposant les médecins au sein de plusieurs castes, et en créant des différences de rémunération pas forcément plus justes...

    "Vous prenez votre temps" et vous avez sûrement raison. Comme vous le soulignez bien il y a plusieurs manières de faire de la médecine, qui correspondent à des attentes différentes des patients, et qui sont sans doute complémentaires.

    Cependant si on pousse encore l'analyse en prenant un point de vue systémique, il faut aussi dire qu'on ne peut pas se permettre d'avoir uniquement des médecins qui fonctionnent comme vous. Pourquoi? Parce que si tous les médecins passent beaucoup de temps avec chaque patient, on n'a pas plus la capacité de soigner tout le monde, dans un contexte de croissance forte des besoins (vieillissement de la population) et de baisse à venir du nombre de médecins. C'est triste mais c'est la vraie équation à résoudre. Encore plus que d'argent, on manque de temps.

    L'analogie avec le restaurant remboursé est intéressante (cf. commentaires). Dans un cas de pénurie alimentaire, est-il raisonnable de laisser la Tour d'Argent organiser des festins pour les plus fortunés, en consommant des rations que les plus pauvres ne peuvent pas se payer?

    A mon sens, le vrai combat de demain n'est pas celui du mode de rémunération, de la liberté tarifaire, c'est celui de l'efficience. Comment continuons-nous à faire de la médecine de qualité en traitant plus de patients?

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    1. La question de l'efficience se pose à l'évidence mais peut nous entrainer vers des travers dénoncés: algorythmes et protocoles désincarnés, délégations mal contrôlées et négation du médecin et de l'acte médical. Note que les questions de l'efficience et du mode de rémunération sont liées par la dernière convention et qu'on est donc obligés d'aborder un sujet avec l'autre ce qui me parait génant à beaucoup de points de vue.
      La question de l'efficience pose deux sous-questions: celle de la compétence du médecin et celle de son domaine d'activité. On le voit très bien dans le microcosme de ma spécialité OPH. Serions-nous tous omniscients et omnicompétents la baisse démographique et l'augmentation de la demande font qu'on a du mal à assurer l'activité qu'on assumait jusqu'à présent (service public hospitalier compris, et largement). Les responsables n'étant pas décidés à ajuster le nombre au domaine d'activité on va réviser ce dernier et envisager des transferts (activité ? compétences ?...). Un problème étant que les médecins, qui trempent au premier chef dedans et qui par le biais de leur syndicat font des propositions depuis des années dans un sens très Santé Publique, sont très peu associés à ces discussions menées entre experts gouvernementaux et les syndicats paramédicaux dont les troupes ne sont pas majoritairement formées à une relation de type diagnostic/ soin autonome. Le pire étant que les confrères et soeurs regardent cela comme un combat corporatiste qui viendra sans doute car les OPH, lassés de voir que des années de remue-méninges en pensant Santé Publique sont écartés par des préoccupations purement économiques et politiques (les non-rameurs), commencent à demander au SNOF des revendications purement orientées vers la gamelle.
      Le reste a été décrit ici et ailleurs, je pense que cela se plaquera à plus grande échelle sur la MG et les autres spécialités.
      Cela dit le mode de rémunération est un vrai problème car on s'est imposés, avec le P4P, de lier fortement revendication socio-économique avec des préoccupations éthiques notoires. Contrairement à ce que pensent beaucoup nous n'avions pas de lien de sujétion financière avec la CPAM, nous nous sommes mis le collier tous seuls.

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  8. Encore une fois je suis particulièrement d'accord avec cette analyse...
    Je suis jeune médecin, tout juste thésée, pas (encore ?) installée et le salariat ne me tente pas.
    Et dans mes nombreux jeunes collègues de promo, beaucoup sont salariés, mais pas pour des raisons financières, je n'ai pas l'impression. Quand j'en parle avec eux, c'est l'apparente simplicité d'un système qu'ils ont toujours connu qui les a attiré. Ils sont salariés comme avant, travaillent à l'hôpital comme avant, ont leur paye qui tombe toute seule sur leur compte tous les mois, sans se faire chier avec des cotisations retraite par ci ou de l'URSSAF par là.
    Le libéral ça leur fait peur : pas pour leur revenus, mais "tu vois toute cette paperasse là j'y comprends rien" c'est compliqué.
    Le poste proposé au CH au final, c'était quand même plus simple.

    Personnellement les années passées à l'hôpital au cours de mes études n'ont fait que renforcer mon envie d'en partir. Les médecins coincés entre ce qu'ils aimeraient faire, ce qu'ils pensaient être le mieux pour les patients; et ce que l'hôpital veut qu'ils fassent "non mais tu comprends on les reconvoque pour faire des entrées, sinon le service perd ses financements"...
    Bref je n'aspirais qu'à partir en libéral afin de pouvoir travailler comme je le souhaitais, prescrire ce que MOI j'estimais adapté, avoir les horaires que je voulais.
    Bon ce n'est pas si simple, les libertés du libéral ne sont pas si libres que ça.
    Mais si on doit dépendre de celui qui nous paye au niveau de notre liberté de travail, alors je préfère dépendre de mes patients.
    Ils me payent, et seuls eux ont ainsi un droit de regard sur ce que je leur prescris.
    Si, comme certains disent que nous sommes déjà, nous devenons salariés... de qui, de l'Assurance Maladie ? nous perdons cette dernière petite liberté de prescrire selon notre âme et conscience en accord avec le patient uniquement, poussée que nous serons à avoir tel pourcentage de génériques, de dépistage etc.

    Alors oui je reste quand même assez attachée au paiement à l'acte, même si il ne me paraît pas adapté à notre pratique. Je continue à trouver anormal d'être payée le même prix quand j'écoute et j'accompagne quelqu'un en pleine dépression pendant 1h quand quand je fais un rappel DTP. Ou d'être payée 28€ pour faire juste un vaccin à un bébé, quand je suis payée 23€ pour faire le point avec une personne âgée polypathologique qui met déjà 1/4h à se déshabiller.
    Mais bon ça on le sait tous, et je me dis que l'un compense l'autre, et qu'on s'y retrouve.
    Mais le paiement à l'acte ne reste pas adapté à toutes les actions de coordination que nous devons avoir sur les pathologies lourdes, enfin je pense.
    La CA et le forfait ALD compensent peut être le temps passé à faire les demandes d'ALD et à faire un peu d'éducation thérapeutique mais qu'en est-il du temps à organiser les soins à domicile d'une personne dépendante, ou en fin de vie ? Des temps de concertation avec IDE, kinés, CLIC, assistante sociale qu'on devrait mettre en place pour assurer une meilleure prise de en charge ?
    Des "réunions bénévoles" qu'il est difficile de faire avec un seul paiement à l'acte, enfin je crois.

    Actuellement je pense qu'un paiement à l'acte avec une part de forfait en fonction des situations et des pathologies me paraît mieux.

    Enfin moins pire.

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    1. J'ai globalement le même sentiment que toi.
      Non, le paiement à l'acte n'est pas une panacée, mais paiement à l'acte ne veut pas dire 23 euro pour tout le monde. On peut aussi moduler en fonction du temps passé, ou autre.
      En tous cas, pour l'instant, c'st ce qui me parait le moins mauvais.

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  9. Quand au clientélisme dérivant du paiement à l'acte, je suis également persuadée qu'il est maintenant très marginal. Sauf pour les "vieux" médecins qui ne peuvent se défaire de cette mauvaise habitude prise il y a longtemps, je crois quand même que de nos jours les médecins essaient de limiter au maximum le nombre de consultations nécessaires...
    Et pour rebondir sur ce que dit Benjamin "Parce que si tous les médecins passent beaucoup de temps avec chaque patient, on n'a pas plus la capacité de soigner tout le monde" je ne suis vraiment pas sûre que ça soit vrai.
    Passer plus de temps avec chaque patient, prendre le temps d'expliquer et de faire un minimum d'éducation thérapeutique, et on verra le nombre de consultations nécessaires diminuer, et ainsi besoin de moins de médecins pour une même population.
    C'est sûrement utopiste mais j'y crois encore...

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    1. Je pense que c'est un peu utopiste :-)

      Certes en faisant de la médecine de qualité, on réduit le nombre et la fréquence des consultations, je n'en doute pas un instant.

      Quand je parle d'efficience et de temps passé par patient, le nombre et la fréquence des consultations font partie de l'équation.

      Mais avec le vieillissement de la population notamment, il y a un phénomène d'augmentation inévitable et significative des besoins. Même si on fait toute l'éducation thérapeutique possible, qu'on limite le nombre de consultations à ce qui est nécessaire, une personne de 70 ans avec des polypathologies va consulter beaucoup plus souvent qu'un jeune de 30 ans. Ceci alors que beaucoup de médecins se disent déjà débordés, et que leur nombre va baisser à 10 ans.

      Changer la manière de travailler est inévitable, quelles que soient les solutions. Une manière d'être plus efficient est aussi de trouver des moyens pour passer moins de temps sur l'administratif et plus de temps avec les patients...

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  10. Bon il faut bien que quelqu'un ne soit pas d'accord dans cet océan d'éloges ;).
    Je suis jeune médecin et je m'installe 'en libéral donc) au mois de septembre. Il est évident pour moi que si la médecine de premier recours existait en salariat c'est l'option que j'aurais choisie.
    Permettez moi quelques réflexions:
    -"Au nom de quelle "pureté" devrait on refuser au patient la parcelle de pouvoir que représente son paiement et la relative sujétion du médecin qui en découle": certes, je suis comme vous un défenseur du patient contre le pouvoir médical d'où qu'il puisse émaner (y compris moi). Mais au nom de quoi le paiement y change quelque chose? J'espère bien pouvoir respecter mon patient en tant que personne consciente, sans qu'il n'ait à me payer en retour. Sinon quid des tiers payants et autres CMUc?
    -"Enfin, ne vaut-il pas mieux dépendre du patient directement que d'une administration ou d'un pouvoir hiérarchique." J'entends bien ce rejet viscéral (que je ne partage pas)de tout ce qui vient de l'état ou de l'institution. Moi, j'imagine plutôt de renforcer la démocratie dans le système solidaire de l'assurance maladie, pour cette institution soit le reflet de la volonté des usagers.
    -"Le médecin serait payé pour un service, avec des heures de présence à accomplir. Passés ces horaires, il serait sûrement difficile d'obtenir un rendez vous ou une consultation en urgence." Vous avez une vision du salariat incroyable! On dirait que nous sommes les seuls à avoir une déontologie, et encore parce qu’on est payés pour ça. Dans votre raisonnement sans incitation financière point de salut.Par ailleurs, j'ai remplacé un médecin surbooké chez qui les patients prenaient rendez-vous 4 jours à l'avance. Et s'il s'agissait d'une urgence la secrétaire avait pour consigne d'envoyer aux urgences...
    -"Eh bien je vous le donne Emile, ça ne marche plus parce que ce n'est tout simplement plus rentable de s'installer à la campagne ! Là ! tout simplement ! " Alors ça désolé mais je n'y crois pas une seconde! C'est beaucoup plus rentable de s'installer à la campagne! Moi je m'y installe en septembre, sans racheter de patientèle et j'ai déjà des RDV pour ma première semaine. Mes amis médecins qui ne s'y installent pas ne veulent pas y aller pour un problème d'aménagement du territoire. Ils ne veulent pas aller au feu partout où l'état s'est progressivement désengagé (fermeture des écoles, postes, hopitaux de proximité, etc.)
    -" Les maladies chroniques nécessitent un suivi constant, des renouvellements d'ordonnance, de la prévention, de l'enseignement thérapeutique... " Bien sûr qu'on peut le faire. Mais le paiement à l'acte n'y incite pas. Vous le faites, je le ferai. Mais passer une heure pour de l'éducation thérapeutique, de la prévention au même tarif que filer un pchit pour un rhume c'est désincitatif (pardonnez le néologisme). Ou alors vous considérez que lorsque l'enrhumé vous paie 23 euros ça compense la prévention du diabétique. Mais là on n'est plus dans le paiement à l'acte.
    Par ailleurs, si j'étais salarié mon temps de formation d'enseignement (car je suis chargé d'enseignement auprès des internes), etc serait compté dans mon temps de travail.
    Vous aurez compris que contrairement à vous je ne pense pas que le paiement à l'acte soit le moins mauvais système possible. Néanmoins, je pense qu'on pourrait voir coexister des médecins de premiers recours payés à l'acte et d'autres salariés...

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    1. Ahhhh ! enfin des opposants. sincèrement, je commençais à me demander si je vivais au pays des bisounours !
      Je vais essayer de répondre point par point :
      Cela m'a surpris moi même, mais je crois que pour un certain nombre de patients, le fait de payer revet une valeur symbolique importante. Pour de nombreuse personnes, je crois que c'est une question de dignité. Mais peut-être que je me trompe... c'est juste 27 ans d'expérience qui me poussent à penser ainsi.
      Quant à moi, je ne suis pas contre un tiers payant. C'est toujours du paiement à l'acte. C'est juste que je ne crois pas qu'un système salarial sera mieux qu'un paiement à l'acte en termes d'efficacité ou même de cout global. La plupart des médecins continueront à travailler pareil. D'autres se planqueront... au bout du compte ce sera juste d'autres ennuis et une dépendance accrue à l'administration. Et cela, personnellement je n'en veut pas !
      Oui, je n'ai pas confiance dans l'administration ni dans les politiques. là aussi, c'est juste du à une relation de 25 ans avec l'administration, et malheureusement, je ne crois plus du tout à la démocratie sanitaire DANS LE CADRE ACTUEL. Avez vous lu "la revanche du rameur" que je cite à plusieurs reprises. C'est édifiant.
      Mais je conçoit que vous ayez encore confiance. Alors je vous souhaite sincèrement d'être dans 10 ans, dans le même état d'esprit qu'aujourd'hui. Après tout, les choses peuvent évoluer...
      Ma vision du salariat : elle est celle de quelqu'un qui a été salarié 6 ans au milieu de sa carrière, et quelques années au cours de ses études, et je sais que tout le monde n'est pas vertueux. J'ai déjà rencontré des médecins qui ne se cassaient pas le tronc, en salariat et en libéral (peut être un peu plus souvent en salariat, mais peut-être...)
      C'est seulement que les heures sup, vous les faites quelques années, et puis comme elles ne sont jamais récompensées, vous finissez un peu par vous lasser. mais cela arrive aussi il est vrai en libéral.
      La rentabilité de la médecine de campagne : là encore, je vous souhaite de garder cet enthousiasme. Si vous recevez les urgences, ce que je fais aussi, méfiance : ça coûte cher, ça prend beaucoup de temps et ça fait fuir les patients qui se lassent de voir leur médecin s'absenter 1 h ou 2 h de la consultation... C'est une gestion compliquée et l'équilibre financier est difficile à atteindre, sauf à accepter un rendement horaire très bas et des horaires à rallonge. On en reparle dans 3 ans, mais je vous souhaite vraiment d'y trouver votre compte.

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    2. En ce qui concerne l'enseignement thérapeutique, je suis assez mitigé. J'ai été responsable de l'enseignement thérapeutique lorsque j'étais salarié. C'est intéressant, et assez déstabilisant ... pour le médecin. Il faut accepter de s'extraire de ses propres shémas de pensée. C'est un échange avec le patient. Il faut accepter qu'il ne change pas radicalement son comportement après une séance d'enseignement thérapeutique, mais plutôt, qu'il modifie progressivement des habitudes délétères. Il faut négocier pas à pas et tenter de comprendre les raisons profondes de la perpétuation de comportements inadaptés. Enfin, parfois le patient sait mieux que vous ce qui marchera chez lui. Oui, cela arrive.
      Tout ça pour dire que je suis assez dubitatif quant à l'efficacité des séances collectives d'enseignement thérapeutique, ou alors il faut faire des séances d'échange informels, et ne pas tenter de "délivrer la bonne parole".
      En maladies respiratoires, nous avions élaboré des supports d'enseignement thérapeutique très élaborés et nous constations souvent que certains patients revenaient d'année en année avec aucune évolution de leurs connaissances, voire avec aucune amélioration de la gestion de leur BPCO.
      Heureusement, d'autres s'amélioraient, mais était-ce les séances collectives ou les entretiens individuels ou les groupes de patients, ou les forums médicaux...
      Le plus souvent, c'est en colloque singulier qu'on dénoue une situation... et cela ne prends pas une heure. Quelques minutes d'entretiens motivationnels font souvent mieux que deux heures de cours magistral.
      L'enseignement thérapeutique, on en fait depuis toujours. Le formaliser et le budgétiser, je ne suis pas certain que cela fasse vraiment progresser la prise en charge réelle des pathologies chroniques par les patients, mais après tout, j'ai bien aimé faire ça et je ne suis pas contre recommencer.
      Dernière chose : Oui à l'heure actuelle, c'est les 23 euros de l'enrhumé (qui n'a pas besoin de consultation) qui paye pour la prévention du diabétique. Mais c'est uniquement parce que le prix de l'acte est rigide. Pourquoi ne pas faire comme en Suisse un paiement au temps passé en entretien...
      Tout est possible...
      Bien confraternellement

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  11. Je préviens à l'avance, j'y connais rien en médecine généraliste, mais en lisant ce post, j'ai eu un vague souvenir.
    Quand j'étais serveur, j'étais salarié, au smic hôtelier. Tout ce que je vendais pendant mes heures de services était comptabilisé, et l'informatique associait 2% de ce montant à mon nom. A la fin du mois, si les 2% étaient inférieurs au smic, je touchais le smic. Si je vendais bien et que ce montant dépassait le smic, mon salaire était égal au montant. Le premier mois j'ai touché le smic. Au bout de 6 mois, j'étais à 18000 francs par mois. Y'avait des serveurs qui vendaient rien et qui étaient très contents avec leur smic, d'autres pros de la vente qui travaillaient le minimum d'heures, et d'autres qui vendaient mal qui travaillaient beaucoup plus longtemps chaque semaine.
    Loin de moi l'idée de comparer la vente à la médecine.
    Peut-être que y'a un angle à travailler pour la médecine? Une forme de "smic médecin", qu'on peut dépasser en soignant plus de monde? C'est juste une idée issue d'une expérience commerciale, j'ai pas les outils pour vous dire si c'est une bonne idée, mais peut-être que vous oui?
    Post très intéressant en tout cas :)

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    1. C'est une idée que nous avions évoqué en réunion de "jeunes médecins" réfléchissant à d'autres modes de rémunération. C'est une bonne idée. Etre payé de façon sure même un jou où il y a moins d'activité et être payé un peu plus les jours où c'est épuisant et où on rentre sur les rotules. Mais repenser les modes de rémunération, c'est un combat, parce que nombreux sont ceux qui pensent que le paiement à l'acte est la panacée, surtout parce qu'ils fonctionnent comme ça depuis toujours, gagnent bien leur vie et ne voient pas pourquoi changer ça.
      Rien qu'au conseil de l'ordre, les médecins sont globalement des médecins urbains et âgés. Ils font partie des gens qui pèsent dans ce genre de décisions, ceux-là ne veulent pas que tout change.

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  12. Merci pour ce long post. (j'aime bien ce que vous écrivez, ça donne un éclairage qu'on a pas quand on est du coté "simple patients").
    Il y a peu, je pensais que le paiement à l'acte c'était vraiment idiot, cher, pas adapté...Et là je vous lit. Et vous retournez toutes mes certitudes. C'est beaucoup plus complexe que je ne l'imaginais! Encore merci pour votre témoignage.

    je suis tombé il y a peu sur un autre témoignage, d'une kiné cette fois, qui explique pourquoi elle a arrêté le libéral: http://leya-mk.blogspot.fr/2012/04/coming-out.html

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  13. Installé depuis quinze ans en libéral après avoir passé six ans à l'hôpital comme urgentiste, je ne regrette pas ce choix.
    J'y ai perdu le travail en équipe et la confiance des collègues de travail mais j'y ai gagné la liberté de me fournir le matériel que j'estime nécessaire à la bonne qualité de ma pratique, la liberté de partir en vacances les 4 semaines que je veux dans l'année (non payées ok) et, après quelques années de vie à crédit, une rémunération qui me permet de bien vivre ET de payer mon outil de travail. Cette indépendance là : de fait et d'esprit me satisfait plus que le salariat.

    Je me souviens du jour où j'ai décidé de quitter l'hôpital : aux vacances de Noël, j'étais monté voir le directeur adjoint (le vrai était en vacances) pour réclamer des compresses pour le samu. "Désolé, plus de budget : il fallait être économe." Je ne pouvais vraiment pas rester dans une structure où l'on produit du soin mais où on refuse de soigner correctement des patients.

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  14. excellent résumé de la situation,
    parmi les avantages les plus importants du salariat sur la médecine libérale il faut quand même évoquer la protection sociale: maladie retraite et surtout maternité, c'est en partie ce qui fait que de nombreuses consoeurs choisissent le salariat, même s'il existe des exceptions.

    vous ne développez pas non plus le troisième item de votre titre: la capitation, mode de rémunaration pratiqué en grande bretagne et qui permet de garder une relation entre charge de travail, revenus du médecins intérêt du patient (s'il est libre de choisir son médecin. A l'usage je ne suis pas sur qu'il faille qu'il remplace intégralement le paiment à l'acte.

    il me semble qu'un mode de rémunération mixte: actes, capitation, forfaits divers, CCAM clinique pour les actes longs.. est l'avenir de la médecine libérale si elle veut survivre.
    Malheureusement cela ne dépend pas de nous sauf changements radicaux au niveau syndical mais ne tirons pas de plans sur la comète, même dieu ne sait pas à quelle sauce les technocrates vont nous manger.

    goldoralex, médecin généraliste récemment installé en zone sous médicalisée semirurale et heureux... pour le moment

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  15. "il me semble que le paiement à l'acte est certainement le plus mauvais système de rémunération d'un médecin... ... à l'exception de tous les autres."

    deux remarques :

    1°/ si c'est le meilleur, comment ce fait-il qu'il est à la fois plus coûteux (du fait des prescriptions induites) pour la collectivité et moins rémunérateur pour le médecin que d'autres ? au hasard, Pays-Bas, Danemark, Allemagne, Grande-Bretagne

    2°/ il y a très largement de la place entre le salariat et du libéral purement à l'acte
    par exemple avec du libéral à rémunération à 3 étages : a/ forfait cabinet, fonction du lieu d'installation et des horaires d'ouverture b/ capitation individuelle (au passage pourquoi capitation familiale ? parce qu'il faut obligatoirement raisonner comme les caisses, par assuré, plutôt que par patient ?) c/ actes, à valeur dégressive au delà d'un seuil

    PS : concernant les CCAM et leurs usines à gaz de tarification, le système a été bien entendu essayé ailleurs et ... abandonné

    PS 2 : il pourrait être intéressant que nos décideurs comme nos syndicats cessent de vouloir ré-inventer constamment l'eau tiède et se penchent sur ce qui fonctionne ailleurs
    pour rappel les meilleurs rapport qualité/prix sont Japon, Suède, Danemark

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  16. Salut!!!

    Je m'étonne toujours de l'absence de connaissance d'un système qui pour moi est le plus juste qui est le payement par capitation!!!

    Le payement à l'acte me semble injuste, après 1 ans et demi de remplacement, il me semble que cela favorise le clientélisme, et occasionne un rapport cout efficacité très médiocre.( très bonne efficacité mais pour un cout très important). Par contre le rapport cout efficacité médiocre c'est une certitude j'ai fait ma thèse la dessus.

    Le salariat n'est pas la solution non plus car il ne favorise pas le rapport cout efficacité non plus.

    La capitation permet d'être réellement payé en fonction de notre travail. Le médecin a tout intérêt à être efficace car de toute façon qu'il voit le patient 1 ou 3 fois dans l'année il est payé de la même façon!! Bref et le fait d'introduire en plus des critères de performance peut améliorer cette prise en charge lorsque les critères de performance tiennent compte de la satisfaction des patients et de la réalisation des objectifs de santé publique et ne sont pas uniquement des critères économiques.

    En attendant, ayant décidé de ne pas abandonner mes principes, même si 2 ans de libéral m'ont appris à être plus flexible, je refuse de m'installer dans les conditions actuelles.

    Le système actuel amènent les médecins comme moi, ( qui essayent d'éduquer leurs patients pour qu'ils aillent à la pharmacie pour la bobologie, qui ne prescrivent que les bilans justifiés, qui ne font pas de complaisance mais qui écoutent beaucoup) Et bien les médecins comme moi ils gagnent pas leur vie, car le dépressif ou la petite mamie polypathologique ou le nourrisson de 1 mois cela ne prend pas que 15 minutes. Et je refuse de médicaliser ce qui ne relève que du bon sens juste pour avoir des clients!!

    Bref depuis mars salarié en psychiatrie, je fais de la médecine générale, de la prévention, dans l'intérêt des patients et uniquement dans leur intérêt. Et tant que le mode de rémunération principal sera l'acte je ne m'installerais pas en libéral. ( J'ai la chance d'être en région parisienne et il y a plein de centre de santé ou l'on peut être médecin généraliste et salarié!!)

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    1. Bonjour,

      Les expériences de systèmes qui fonctionnent principalement à la capitation ne sont pas forcément très convaincants, par exemple en Angleterre.

      Tandis que le paiement à l'acte peut encourager une forme de clientélisme (on fait revenir les gens pour rien), la capitation elle encourage à la sous-qualité (on ne fait pas revenir alors que ça le mériterait...). Je reconnais que je n'ai pas de source solide sous la main, mais les déviances liées à chaque système semblent relativement logiques. On ne peut pas compter uniquement sur la vertu des participants au système, il y aura toujours des gens qui chercheront, consciemment ou non, à en exploiter les failles, et qui rendront in fine le système injuste.

      Quant au salariat, tous les chiffres le montrent: les médecins salariés traitent beaucoup moins de patients que les libéraux, et là encore c'est humain. Un médecin salarié coûte en fait beaucoup plus cher en moyenne à la société qu'un libéral. La plupart des hôpitaux, dispensaires etc sont en déficit, et la réalité va les rattrapper. Dans un contexte de pénurie humaine et financière, ce ne peut pas être la solution unique. C'est d'ailleurs à mon avis la raison principale au fait qu'on n'embauche pas à tour de bras des médecins salariés dans les zones défavorisées... Sinon quoi d'autre?

      La réalité d'une rémunération "juste" est sans doute un compromis entre les différents systèmes, voire leur coexistence.

      N'oublions pas que la rémunération des médecins est en réalité plus ou moins une enveloppe fixe, qui correspond au budget des caisses. Choisir un mode de rémunération particulier ne change pas vraiment la rémunération moyenne des praticiens, uniquement la répartition du gâteau de manière plus ou moins juste! Si on oublie ça on occulte la partie immergée de l'iceberg.

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  17. -->"Quant au salariat, tous les chiffres le montrent: les médecins salariés traitent beaucoup moins de patients que les libéraux"
    Oui mais encore faut-il savoir de quoi on parle. Est-on certains que les patients "traités" méritaient de l'être. Sur une journée de consultation de 30 patients vous pensez tous que les 30 méritaient d'être vus???

    -->"Un médecin salarié coûte en fait beaucoup plus cher en moyenne à la société qu'un libéral" Quelles sont vos sources?

    -->"La plupart des hôpitaux, dispensaires etc sont en déficit, et la réalité va les rattrapper" Si l'on considère la santé comme un bien de consommation commun, qui doit être rentable effectivement ça va poser problème. Les hôpitaux qui font de la gériatrie, ou de la pédiatrie vont avoir du mal à être rentables, du moins si l'on continue à utiliser la T2A. Mais beaucoup de cliniques privées avec des médecins salariés sont très rentables!

    -->"C'est d'ailleurs à mon avis la raison principale au fait qu'on n'embauche pas à tour de bras des médecins salariés dans les zones défavorisées... Sinon quoi d'autre?" Lever de boucliers des médecins libéraux et du conseil de l'ordre à la simple évocation de cette solution, dans un passé assez récent lorsque la fédération hospitalière avait proposé cette solution.

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    1. -->"Un médecin salarié coûte en fait beaucoup plus cher en moyenne à la société qu'un libéral" Quelles sont vos sources?

      il suffit de prendre ce qui est la base de comparaison entre libéral et salarié, à savoir le taux horaire toutes cotisations comprises


      le MG libéral moyen est alors à 34 euros par heure :
      BNC + charges sociales + "participation des caisses" (là je suis très très gentil : en effet les données CNAM elle-même montrent que les seules cotisations des libéraux couvrent leurs dépenses et que cette caisse est BENEFICIAIRE; comme si la cnamts était bénéficiaire SANS les cotisations patronales ....)
      divisé par
      nombre d'heures de travail annuel (ici 57 x 48 semaines)

      ces 34 euros par heure équivalent pour un poste salarié 48h/semaine à un salaire mensuel net de 3 200 euros

      un médecin salarié 48h/semaine est-il payé plus de 3 200 euros nets par mois ?
      la réponse est évidemment oui

      concernant les cliniques, voir ici
      http://www.europe1.fr/Economie/Le-nombre-de-cliniques-en-deficit-augmente-1115145/

      sur le fait que nous avons 2 fois plus d'hôpitaux et 2 fois plus de lits d'aigu, et pas assez de lits d'aval par rapport aux références lire ici :
      http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2009-04/rapport_le_recours_a_l_hopital_en_europe_2009-04-03_09-48-38_85.pdf

      et pour faire pendant sur le libéral, concernant le mythe du manque de médecins en ville :
      si on avait une organisation cohérente = filière de soins, les besoins sont de 45 000 MG (contre 62 000 actuellement) et 11 000 spécialistes (contre 48 000)

      désorganisation et gabegie sont les mamelles du système sanitaire français

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    2. -->"Quant au salariat, tous les chiffres le montrent: les médecins salariés traitent beaucoup moins de patients que les libéraux"
      Oui mais encore faut-il savoir de quoi on parle. Est-on certains que les patients "traités" méritaient de l'être. Sur une journée de consultation de 30 patients vous pensez tous que les 30 méritaient d'être vus???

      Certainement pas, mais est-ce vraiment très différent pour les médecins salariés? Sur les 15 patients, les 15 méritaient-ils plus d'être vus? Les patients qui vont à l'hopital ou au dispensaire n'y vont-ils que pour des bonnes raisons? Et je ne parle pas de ceux qui auraient de bonnes raisons d'y aller mais n'y retournent pas vu les conditions dans lesquelles ils sont soignés (sans critique sur les médecins qui subissent, je précise)

      -->"Un médecin salarié coûte en fait beaucoup plus cher en moyenne à la société qu'un libéral" Quelles sont vos sources?

      Xavier Tarpin répond bien à cette question, les sources sont nombreuses et le calcul rapide. J'ajouterai que les études, notamment de la Cour des Comptes, montre qu'un patient qui passe la porte des urgences d'un hopital, même pour un rhume, coûte à la société plus de 200 euros. A mettre en regard avec une consultation d'un libéral à 23€ (ou plus). Cela donne une idée du désastre pour les finances publiques si la médecine libérale continuer à reculer comme elle le fait en ce moment.

      -->"La plupart des hôpitaux, dispensaires etc sont en déficit, et la réalité va les rattrapper" Si l'on considère la santé comme un bien de consommation commun, qui doit être rentable effectivement ça va poser problème. Les hôpitaux qui font de la gériatrie, ou de la pédiatrie vont avoir du mal à être rentables, du moins si l'on continue à utiliser la T2A. Mais beaucoup de cliniques privées avec des médecins salariés sont très rentables!

      Je ne considère pas la santé comme un bien de consommation commun, ni d'ailleurs qu'elle doit être rentable. Je dirais même que pour son bien il vaut mieux qu'elle ne soit pas trop rentable... Evitons les caricatures. En revanche il y a une réalité économique qu'on ne peut nier: pour payer les médecins et l'ensemble du système, il faut de l'argent. La question du modèle se pose forcément! Chaque modèle a des avantages, des inconvénients, et un coût que la société est prête ou non à assumer. Et si les hopitaux et dispensaires sont en déficit chronique, c'est que la société n'est pas prête à en assumer le coût. Il n'y a pas de jugement moral, c'est juste la dure réalité.

      -->"C'est d'ailleurs à mon avis la raison principale au fait qu'on n'embauche pas à tour de bras des médecins salariés dans les zones défavorisées... Sinon quoi d'autre?" Lever de boucliers des médecins libéraux et du conseil de l'ordre à la simple évocation de cette solution, dans un passé assez récent lorsque la fédération hospitalière avait proposé cette solution.

      ok, soit. Mais je considère qu'il y a d'autres raisons politiques profondes, qui sont celles que j'avance.

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  18. Ton parcours est plein d'enseignement.
    Pour travailler actuellement à cheval entre le libéral et un ex hôpital local, je me fais une petite idée des 2 modes d'exercice. Mais tous ces jeunes qui choisissent de travailler en hospitalier, avec les contraintes que ça implique, l'accréditation, les durées moyennes de séjour, véritable graal imposant de foutre les gens dehors avant qu'ils en soient capables, la sacrosainte traçabilité qui nous fait passer plus de temps assis devant l'ordi qui dans la chambre des patients, les réunions, les luttes de hiérarchie, au secours!
    J'ai du mal à imaginer qu'on se sente à sa place dans ce système qui s'autosclérose progressivement, et qui peine à donner le sentiment d'avoir fait un travail intelligent et utile à la fin de la journée.
    Et le plus inquiétant, tu le soulignes d'ailleurs, c'est qu'en libéral, on nous demandera progressivement aussi de se soumettre à un certains nombre d'indicateurs qui risquent de modifier notre libre arbitre, et nous faire prescrire certains vaccins, traitements, examens complémentaires, dans l'intérêt des caisses avant celui du patient.

    Je crois que je vais finir pour ouvrir un restau!..

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    1. Bonjour.
      Tu résume très bien mes appréhensions. C'est exactement cela.
      Mais je suis sûr que cette destruction (le mot n'est pas trop fort) de ce qui fait l'essence de notre métier n'est pas une question de hasard ou d'incompétence des décideurs. C'est une démarche engagée de longue date, dans le cadre d'une lutte de pouvoir.
      Avec ce billet, dont j'ai très mal choisit le titre, je voulais juste parler de la campagne actuelle de dénigrement du paiement à l'acte qui me semble faire partie de cette entreprise de destruction progressive de la médecine libre (je ne dis pas médecine libérale - la médecine libre concerne simplement les médecins libres de pratiquer la médecine au plus près des intérêts de leurs patients)
      Je suis surpris, comme toi, de voir beaucoup de jeunes (pas tous) rejeter en bloc le "libéral" et plébisciter la tutelle d'une hierarchie à travers un salariat ou une capitation...
      ATTENTION ! MANIPULATION DES ESPRITS !
      Le salaire n'est pas plus vertueux ni plus économique que le paiement à l'acte !
      Amicalement.

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  19. Encore une super analyse, même si en temps qu'étudiant ela me fait peur! Contrairement à mes collègues je suis fan de l'exercice libéral alors d'ici que je finisse mes études qu'en sera t'il... A voire!

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