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mercredi 13 avril 2011

Petite Escarmouche avec le conseil de l'ordre. (première passe d'arme) (1)

 L'automne dernier, dans un contexte de grande difficulté liée à un certain nombre de défections pour raison de santé ou d'age, des médecins de mon secteur ont décidé de forcer la main à l'ARS et au conseil de l'ordre en menaçant de ne plus prendre leur astreinte entre minuit et 6 h du matin. 
La réaction du conseil de l'ordre ne s'est pas faite attendre longtemps. 
C'est un monument d'hypocrisie papelarde et de couardise.
Je la livre ici, avec ma réponse. Bien sûr, j'ai légèrement modifié les noms. Ne cherchez pas, le Jura Atlantique n'existe pas en France (peut être en Suisse ?).
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Ordre National des Médecins
Conseil départemental
du Jura Atlantique

N/Réf. : 333/45
à Docteurs LEGRAND, LELONG, LEGRAS et LEPETIT



Machin La Grande, le 6 octobre 2010


Cher Confrère,

Le Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins a pris connaissance, lors de sa séance du 5 octobre dernier, de votre non-volontariat pour assurer la permanence des soins de votre secteur en nuit profonde.

Nous vous rappelons que, conformément aux dispositions légales prévues par le Cahier des charges (arrêté préfectoral du 8 juin 2006 fixant les conditions de fonctionnement de la permanence des soins dans le Jura Atlantique), la garde médicale doit être assurée :
. les nuits (en semaine) de 20 heures à 8 heures,
. les week-ends et jours fériés (du samedi 12 heures au lundi 8 heures).

Toute modification doit être présentée et approuvée par le Comité Médical de l’Aide Médicale Urgente pour la Permanence des Soins (CODAMU-PS). Conformément au dernier décret du 17 juillet 2010, l’Agence Régionale de Santé constitue la seule instance responsable de l’organisation de la permanence des soins et de l’arrêté concernant le cahier des charges, assurant en outre la co-présidence du CODAMU-PS.

En conséquence et en l’état actuel des dispositions applicables dans notre département, nous ne pouvons tenir compte de votre décision de ne pas assurer vos gardes en nuit profonde. Nous tenons à vous rappeler qu’en cas de refus de votre part lors d’un appel médical urgent (régulé ou non) intervenant de minuit à 8 heures, votre responsabilité civile serait engagée.

Comptant sur votre compréhension, nous vous prions de croire, Cher Confrère, à l’assurance de nos sentiments les meilleurs.


Docteur Jean Aymar DESASTREINTES
Président de la Commission Gardes et Urgences



Copie adressée à la Délégation Territoriale de l’Agence Régionale de Santé

Adresse e.mail : Jura-Atlantique@66.medecin.fr
Adresse postale : B.P. 11022 - 99510 MACHIN LA GRANDE

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Bien que ne faisant pas partie de ceux qui avaient décidé de stopper les frais à minuit, je ne pouvais bien sûr pas ne pas répondre. 
Non mais, pour qui il se prends ce con !
J'ai donc sorti ma plus belle plume et mon flacon de vitriol et en m'appliquant bien, avec le bout de la langue entre mes lèvres, je lui ai fait cette petite réponse  (Hé hé!)

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Dr DE MONTAGNE
Médecine générale – Médecine de montagne
Centre Médical de St Frusquin la montagne
99210 St FRUSQUIN

                                        à      Docteur Jean Aymar DESASTREINTES
                                                Président de la Commission Gardes et Urgences
                                                Conseil départemental de l’ordre des médecins du J.A.


St Frusquin, le 7 octobre 2010.



Monsieur,

Je viens de prendre connaissance de votre lettre de menaces, concernant l’organisation de la permanence des soins en nuit profonde, dans les secteurs de Troufignan et de la vallée de la Bidouille et, bien que participant à la PDS en nuit profonde, elle m’inspire quelques remarques et réflexions.

Premièrement, vous ne connaissez pas notre secteur ni les médecins libéraux qui depuis des dizaines d’années assurent le travail sur le terrain.
Vous adressez en effet cette lettre à notre consœur, le Dr LELONG qui souffre en ce moment, comme tout un chacun le sait ici, d’une « longue maladie ». Doit-elle poursuivre les nuits profondes entre deux traitements lourds ?
Vous menacez également le Dr LEGRAND qui, enceinte et proche d’accoucher, devra sans doute reprendre les nuits profondes jusqu’au terme de sa grossesse !
Le docteur LEGRAS qui, à plus de soixante ans, continue de travailler 10 à 12 h par jour, 6 jours sur 7 chaque semaine, et 15 à 20 dimanches dans l’année, est également visé par votre missive.
A quel âge dois-je personnellement espérer arrêter les nuits profondes ? 65 ans ? 70 ans ? 82 ans et demi ?
Au mieux, vos menaces sont grotesques.
Au pire elles sont indécentes !

Deuxièmement, les médecins ont toujours assuré la PDS nocturne car c’était avant tout, une obligation déontologique.
C’est la chute de la démographie médicale libérale, dont nous connaissons tous les causes (gouvernementales), qui est à l’origine des difficultés actuelles.
Si un médecin juge que la surcharge de travail et de tension nerveuse occasionnée par la répétition de journées chargées et de gardes itératives met en danger sa santé mentale ou physique, ou son équilibre familial, il est de son devoir de se retirer d’un service qu’il ne pourra de toutes manières pas assurer correctement.

Croyez vous réellement que c’est en forçant vos confrères à travailler comme des serfs, que l’on va résoudre le problème de la PDS en nuit profonde ?
Si oui, je préfère encore éviter de vous dire le fond de ma pensée.
Si non, pourquoi vous faire la courroie de transmission du ministère et de l’ARS, avalisant de fait, un nouvel abus de pouvoir, qui aura certainement des conséquences funestes.


Le conseil de l’ordre n’aurait-il d’autres fonctions que celle de servir la soupe aux « puissants » ?
Dans l’affirmative, démissionnez, de grâce, et dissolvez cette pénible institution. Cela nous soulagera toujours d’une cotisation obligatoire.

Troisième remarque : Vous vous adressez à des médecins libéraux.
« Libéralisme », dois-je vous le rappeler, est un mot dérivé de la racine « liber » (libre).
Chacun d’entre nous à choisi de renoncer à toute sorte d’avantage social, pour préserver son espace de liberté : liberté d’installation, liberté d’honoraire, liberté de prescription, de temps de travail, etc…
Aujourd’hui, un nouveau pan de ma liberté individuelle et professionnelle vient de m’être retiré.
Si j’analyse la situation : je suis un médecin libéral (donc naturellement privé des avantages du salariat), mais un médecin libéral :
  • privé de sa liberté d’honoraire ;
  • privé de sa liberté d’organiser comme il l’entend sa protection sociale et sa retraite;
  • privé maintenant de sa liberté de jouir comme il l’entends de ses nuits et de ses WE ;
  • privé bientôt de sa liberté de prescription et de sa liberté d’installation
  • etc…
Est-ce là la relation que le pays souhaite établir avec moi ?
Convenez en, tout cela tourne à la mauvaise farce ! Mais je vous assure que je n’en resterai pas longtemps le dindon.
Grâce à vous (entre autres) ma décision est prise : je vais quitter le navire. Avec d’autres.
Mais, rassurez vous, grâce aux décrets de la loi HPST, les patients de notre secteur bientôt totalement déserté par les médecins, pourront toujours être soignés …par des médecins des villes, envoyés de force passer les week-end à Troufignan et dans la vallée de la Bidouille.
Peut être, vous, mon cher confrère.
A vous les routes enneigées de nos vallées.
A vous les week-end « à la neige » à réduire les luxations de l’épaule, immobiliser les fractures du poignet, suturer les plaies. Et après un bon dimanche de travail, à vous les routes verglacées à  3h du matin pour aller à la gendarmerie de Trouduc sur Bidouille, visiter un ivrogne en salle de dégrisement…

Comptant sur votre compréhension.
Salutations 

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Et toc.

2 commentaires:

  1. Le libéral c'est le mal.

    La liberté d’honoraire, elle existe depuis 20 ans je crois — le secteur deux que je boycotte.

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  2. Le secteur 2 a été créé il y a 32 ans (1980).
    Il a été fermé aux généralistes en 1990, les médecins qui en bénéficiaient à l'époque pouvant en garder le bénéfice.
    A l'heure actuelle il n'est pas un médecin de secteur 2 de moins de 50 ans.
    rassurez vous, bientot, il n'y aura plus de secteur 2 en médecine générale. D'ailleurs il n'y aura sans doute plus de médecin généraliste non plus. Comme ça la sécu fera des économies ;-)

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